Indice des feux

Indice des feux d’Antoine Desjardins aux Éditions de La Peuplade

“ Quand on nous monte ici, on le sait tout de suite qu’on en ressortira plus. […] même si personne n’ose le dire, c’est écrit noir sur blanc, c’est gravé jusqu’au sang : ça finit là. ”

Accompagné un adolescent en fin de vie qui part presque sans regrets avant la fonte totale des glaciers, ça donne sérieusement à réfléchir sur le devenir de notre monde.

Bouleversement émotionnel intense pour cette première nouvelle qui donne le ton de la suite.

L’auteur met en scène des personnages qui se soucient de protéger la planète, sa faune et sa flore. On découvre des hommes et des femmes en plein désarroi qui s’interrogent sur le futur.

Qu’ils soient futurs parents, amoureux des oiseaux, des arbres, survivaliste, ou en même en fin de vie, chacun espère que la bêtise humaine souvent responsable de bien des maux disparaîtra avant l’effondrement, avant que tout s’éteigne à petit feu.

Les indices sont là devant nos yeux, signes précurseurs avant l’embrasement.

[…] Ça sert à rien d’essayer de sauver la planète, les océans, la forêt amazonienne ou les koalas. Ce qu’il faut sauver… ce qu’il faut établir, soigner, rapiécer, c’est notre relation au monde dans lequel on vit trop souvent en surface, sans y être vraiment. Sauver notre relation à la nature, au vivant, parce que tout le reste en dépend. Tu me suis ? ”

Mais heureusement il reste la sagesse des anciens qui possèdent le pouvoir de transmettre l’espoir à la jeunesse, il suffit juste d’ouvrir grand ses yeux, de tendre l’oreille et de se souvenir.

[…] Il faut prendre soin, mon homme. Prendre soin de tout, en particulier de ce qui est en train de disparaître.

Sept nouvelles, sept belles histoires, toutes différentes, toutes porteuses de messages, de tendresse, d’amour mais aussi d’espoir pour ne pas oublier que la vie est précieuse, tout comme notre planète et même si nous ne sommes que de passage, en prenant soin des uns et des autres, en s’unissant il est encore possible de sauver notre terre d’accueil.

Indices des feux, des nouvelles du feu de Dieu, les clés du Paradis pour ne pas connaître l’enfer.

Pour info :

Antoine Desjardins est né au Québec. Il est enseignant et écrivain.

Indice des feux est son premier livre.

Je remercie Masse critique Babelio et les éditions de la peuplade pour ces nouvelles pleine d’humanité aussi inspirantes que réconfortantes.

Le lièvre d’ Amérique

Le lièvre d’Amérique de Mireille Gagné aux Éditions La Peuplade

Encore le même cauchemar. Diane sursaute et ouvre les yeux, aussi anxieuse que la veille. Quelqu’un l’a poursuivie toute la nuit. Elle se remémore un chemin touffu. L’hiver. Des branches de sapin lui frôlant le visage. Il fait froid, mais elle ne le ressent pas vraiment. Ou très peu. Un cri étrange. Comme celui d’un enfant perdu en forêt. Ou était-ce le sien ? La scène fuit devant la réalité. D’un claquement de doigts. Son appartement se superpose au rêve. “

Diane est ce qui pourrait s’apparenter le mieux à une employée modèle. Une véritable acharnée du travail qui ne compte pas ses heures. Mais depuis quelques temps, elle ressent d’étranges sensations même si cela ne l’empêche pas de se surpasser au travail comme à son habitude, elle ne peut pas faire taire les inquiétudes qui l’envahissent face aux regards que lui portent ses collègues. Et si l’intervention chirurgicale qu’elle venait de subir y était pour quelque chose ?

” Dans l’exaltation de son retour, elle ne remarque pas que ses collègues l’examinent attentivement de la tête aux pieds. À l’affût du moindre changement. La moindre faille. Un rien démarre une rumeur. Ils notent une certaine agitation dans ses mouvements, par saccades. Une manière inhabituelle de bouger les yeux. Aussi, son port de tête est plus reculé, et ses lèvres sont étrangement serrées par- dessus ses dents. Plusieurs minimes changements l’animent, comme si, pendant sa brève absence, quelqu’un d’autre s’était immiscé dans son corps. “

Des souvenirs resurgissent du passé. Quinze ans plus tôt, pendant son adolescence à l’Isle-aux-grues , elle avait fait connaissance avec un jeune homme fasciné par les espèces en voie d’extinction. Une rencontre marquante qu’elle n’a jamais complètement oublié.

” J’ai su qu’on deviendrait plus que des amis.

Tu n’étais pas comme tout le monde. “

Et si tout ceci était lié ?

Ce que j’en dis :

Le lièvre d’ Amérique sort des sentiers battus c’est le moins que l’on puisse dire.

Il a franchit les frontières pour nous permettre de découvrir son histoire atypique.

D’un chapitre à l’autre, le lièvre d’Amérique bondit et nous embarque dans une fable contemporaine adaptée librement par Mireille Gagné d’une histoire algonquienne, où l’on découvre les origines de Nanabozo.

Impossible de ne pas être sous le charme de ce récit qui tout en gardant une part de mystère nous fait rêver à travers ce comte original et poétique.

Un véritable plaisir pour les sens qui se réveillent avec une folle envie de filer au Canada, pour suivre les traces de ce lièvre à travers cette nature où l’on pourrait se perdre pour oublier toute cette effervescence qui bouscule notre quotidien.

Liberté quelque peu retrouvée, mais toujours avec quelques barrières étant donné le climat actuel, il fait bon de croiser ce genre de livre sur notre route littéraire, de laisser les plumes canadiennes nous permettre de formidables évasions grâce notamment à cette maison d’éditions La peuplade, qui nous offre à petit prix des voyages extraordinaires et nous permet de rencontrer des auteurs remarquables.

Alors sortez votre collet, filez en librairie et n’hésitez pas à piéger ce lièvre d’Amérique, vous ne pouvez pas le rater, sa couverture est magnifique.

Même s’il est plutôt malicieux :

Pour info :

Mireille Gagné est née à l’Isle-aux-Grues et vit à Québec.

Depuis 2010, elle a publié des livres de poésie et de nouvelles. 

Le lièvre d’Amérique est son premier roman.

Je remercie l’agence Trames et les Éditions La peuplade pour ce voyage poétique dépaysant .

“ Homo Sapienne ”

Homo Sapienne de Niviaq Korneliussen aux Éditions La Peuplade

Préface de Daniel Chartier

Traduction du danois par Inès Jorgensen

Validation linguistique à partir du texte original groenlandais par Jean-Michel Huctin

” – Arnaq… Je voudrais juste savoir.

– Alors viens. Tu peux pas le savoir avant d’avoir essayé ! ON N’A QU’À FAIRE L’AMOUR !

Elle rigole depuis sa chambre.

Comment ce serait, comment réagirait-elle si je venais, qu’arriverait-il à notre amitié, comment ce serait d’essayer avec elle, de quoi a-t-elle l’air nue, elle a sûrement l’air sexy, comment embrasse-t-elle,comment fait-elle l’amour, comment réagirait-elle si je venais, comment est-elle, comment puis-je m’imaginer y aller ? Non, ça ne me viendrait pas à l’idée. Je trouve que mes pensées sont bizarres. Mais j’en ai assez des saucisses. Saucisses à hot-dog, saucisses pur porc, saucisses de Francfort, saucisses cocktail, rouges, brunes, jaunâtres, grandes, petites. You name it. J’en ai assez. Je n’ai plus de goût pour les saucisses. Veux décaper mon corps sous la douche, pour que la puanteur de saucisse disparaisse sans traces dans les conduits.

Projet :

No more sauvage.

À travers ce roman choral, cinq jeunes ( Deux lesbiennes, un gay, une bisexuelle et une transsexuelle) du Groenland de la ville de Nuuk se livrent et se délivrent du poids et des peurs engendrées par leurs différences. Sujet interdit, ici ou ailleurs qu’il est temps de libérer au grand jour sans avoir peur de jugement.

La jeunesse une période déjà compliquée en soi se révèle absolument encore plus complexe quand l’identité sexuelle s’avère confuse.

” Sans me poser de questions, j’ai découvert que j’étais différente des autres filles.“

Sur « L’île de la colère » le Groenland ainsi baptisé par l’écrivaine, les tabous éclatent, les cœurs s’ouvrent, les voies s’élèvent, c’est la fin d’un long moment de silence.

Ce que j’en dis :

Totalement avant-gardiste, cette jeune écrivaine révolutionne la littérature avec cette œuvre universelle.

Une véritable quête d’identité sexuelle pour toute la jeunesse d’aujourd’hui, la fameuse génération y.

Aussi percutante qu’audacieuse, cette nouvelle voie si jeune s’impose à travers cette criante vérité. Des mots justes, touchants, parfois bruts où l’amour en sort vainqueur.

Une belle découverte, un roman qui ne peut laisser personne de glace.

Née en 1990, Niviaq Korneliussen a grandi à Nanortalik, au sud du Groenland. Homo Sapienne marque un tournant dans l’histoire littéraire groenlandaise en rejoignant un lectorat en dehors de la terre natale. L’écrivaine s’affirme avec ce premier roman comme la nouvelle étoile du Nord.

Ce qu’elle en dit : « Les histoires de chasseurs du passé, les récits sur l’influence de la nature, cela ne m’a jamais intéressée. Dans ma jeunesse, j’ai cherché en vain un livre qui me parle, qui raconte ce que moi et mes amis vivions et les quest qui nous préoccupaient. Je n’ai jamais trouvé ce livre. Je crois que c’est ce que j’ai voulu écrire, ce livre que je n’ai jamais pu lire. »

Je remercie les Éditions de La Peuplade pour cette découverte révolutionnaire.

“ Les excursions de l’écureuil ”

Les excursions de l’écureuil de Gyróir Elíasson aux éditions La Peuplade

Traduction de l’islandais par Catherine Eyjófsson

Je n’ai pas encore commencé à bouger, mais je me redresse maintenant sur un coude et mordille la housse de mon édredon, engendrant un frottement agréable tandis que je parcours du regard ce monde à part, quadrangulaire, qu’on peut isoler d’un tour de clef et peintre de couleurs vives. On peut toujours changer les mondes. “

Sigmar est un petit garçon à l’imagination débordante. Pour pallier à sa solitude, il s’invente un monde irréel peuplé d’animaux. Il prends l’apparence d’un écureuil et s’immerge dans un de ses dessins pour partir à l’aventure.

” Je ne dessine pas davantage. Au lieu de quoi, je me déplace vers un grand espace vide et commence à écrire ce que je vois se dérouler sous mes yeux : l’ écureuil se met à bouger. Sans sortir de la page, mais en s’enfonçant dans le papier brun. Les arbres qui entourent la cabane frémissent. J’écris et suis déjà entré à moitié dans le dessin. Le climat y est chaud, le paysage est beau et je n’ai pas envie de faire marche arrière. (…) Je vais plus loin, je saute le pas, je suis devenu écureuil.“

Un nouveau monde s’offre à lui, ses rêves peuvent prendre vie. Peut-être va-t-il retrouver ce garçon mystérieusement disparu, ou tout simplement se faire des amis pour ne plus jouer seul ?

À travers cette fable, l’auteur islandais amène le lecteur à s’interroger sur le pouvoir de l’imaginaire face au tangible, derrière un univers fantasque où se cache une grande solitude.

Un roman publié il y a trente ans en Islande, qui m’a fait penser au Petit Prince de Saint Exupery, un autre petit aventurier. Des enfants, prêt à tout pour ne pas rester isolé quitte à s’inventer un autre monde peuplé d’amis imaginaires.

Un récit parfois confus, tout comme peut l’être une histoire où le narrateur est un gamin comme présentement, mais qui plaira à tous les naïfs capables de garder leur âme d’enfant.

Gyrõir Elíasson est l’un des écrivains les plus important de sa génération en Islande. On lui a attribué en 2011 le Prix de Littérature du Conseil Nordique. Il vit à Reykjavik.

Je remercie Camille et les éditions La Peuplade pour ce conte fantaisiste et leur souhaite la bienvenue dans l’univers livresque.