La fresque

La fresque d’Alain Siméon et Sandrine Zorn aux Éditions Lajouanie

Camille, debout devant sa fenêtre, porta son attention sur le terrain vague puis sur la fresque. Aujourd’hui, le mur décrépi était entièrement couvert, suggérant la fin de l’histoire. Elle la détailla, tour à tour séduite, interrogative et mal à l’aise. L’expression du tourment y était criante. La violence explosait, accentuée par l’omniprésence du rouge carmin. Elle était trop loin pour saisir toutes les subtilités. Néanmoins, son intérêt était suffisant pour qu’elle se soit à plusieurs reprises introduite sur le chantier pour en observer les détails. Elle avait photographié sa progression. Par contre, jamais elle n’avait vu l’auteur. (…) Depuis peu, des objets étaient apparus, essentiellement des bijoux, comme des éléments significatifs… Mais de quoi ? “

Après avoir réussi à percer les secrets de Mitragyna, Camille Jeanson, la jeune chercheuse est devenue présidente d’une association écologique.

Depuis son bureau, soir après soir, elle suit la progression d’une œuvre artistique taguée par un inconnu plein de talent.

Plus elle l’observe, plus elle a l’impression que cette magnifique fresque cache un message.

De son côté, le capitaine Silas Kravinsky est toujours à la recherche de l’assassin de sa femme.

Quand à son tour, il découvre la fresque, et y aperçoit certains éléments, son sang ne fait qu’un tour. Il est temps de rouvrir cette enquête inachevée et mettre fin à tant d’incertitudes.

Même si Camille vient d’être sollicitée pour enquêter au sein d’un grand quotidien, Silas sait qu’il pourra compter sur son aide.

” Silas n’en croyait pas ses yeux, les événements récompensaient enfin sa ténacité. Tout ce fatras d’affaires révélait finalement des liaisons. De longues années de veille et le chasseur trouvait une trace à suivre, récompensant la patience et l’obstination. “

Ce que j’en dis :

Il est désormais certain que ces deux têtes bien pensantes se sont bien trouvées et ils nous le prouvent avec ce deuxième polar contemporain et sociétal absolument réussi.

Toujours d’une grande maîtrise dans l’écriture et la construction, se servant d’une manière très originale d’un graff, ils nous offrent une nouvelle aventure en compagnie du duo rencontré dans leur premier roman, Camille et Silas.

Camille est cette fois plus posée, mais toujours un brin rebelle et toujours aussi déterminée, prête à tout pour que la vérité éclate au grand jour. Quand à Silas, la zone d’ombre de son passé s’éclaircit et on découvre un homme plus fragile derrière sa carapace d’homme de loi.

Sans le savoir au départ, ce duo va se retrouver au cœur de deux affaires qui semblent liées entre elles.

Mais chut, gardons le suspens pour les futurs lecteurs dont vous ferez partie évidemment.

Tout comme notre duo d’écrivains, ces deux là font la paire, je m’y suis attachée forcément et j’ attend leur prochaine affaire avec impatience

Alors cet été, rajoutez La fresque à votre sélection de lecture estivale, vous verrez ce récit est extra mais pas que…

Pour info :

Sandrine Zorn évolue dans le domaine de l’agriculture. Elle travaille et réside à Metz. Alain Siméon est enseignant et chef d’entreprise. Il habite Troyes. 

Ils se sont connus sur les bancs de l’uni­versité et se sont découverts une passion commune, la littérature policière. Depuis ils se retrouvent régulièrement sur les salons. C’est lors d’une manifestation consacrée au polar qu’ils ont décidé de se lancer dans l’écriture d’un roman à quatre mains.

La fresque est leur deuxième roman.

Je remercie les Éditions Lajouanie pour cette formidable nouvelle enquête.

Le portrait de la Traviata

Le portrait de la Traviata de Do Jinki aux Éditions Matin Calme

Traduit du Coréen par Kyungran Chol et Delphine Bourgoin

” Une femme et un homme ont été assassinés à l’arme blanche. Leurs corps ont été retrouvés dans l’appartement de la jeune femme. Tous deux étaient presque des inconnus l’un pour l’autre. “

Voilà comment démarre cette histoire, une double mort dans un appartement au premier étage d’un immeuble. Se sont-ils entretués ?

” (…) D’après moi, le mobile d’un crime est plus important que la méthode utilisée ou les indices relevés. Une fois qu’on l’ a établi, il ne reste plus qu’à dérouler le fil pour trouver le coupable. “

Ou alors une tierce personne ? Mais alors qui est le coupable ? Le concierge peut-être ? Ou le petit ami d’une des victimes ?

 » – Ce meurtre est un véritable travail d’orfèvre. Nous allons devoir faire preuve à notre tour d’une grande imagination et nous montrer à la hauteur de son génie. “

Pour Lee Yuhyeon, cette affaire est pleine de mystère et l’aide précieuse de l’avocat Gojin, baptisé l’avocat de l’ombre sera la bienvenue.

” Lee Yuhyeon a l’impression que le brouillard se dissipe. Le lieu du crime, les indices, les dépositions des témoins… Le puzzle prend forme. “

Un véritable jeu de piste pour trouver le véritable meurtrier commence, les interrogatoires s’enchaînent car ils sont nombreux en fin de compte à avoir une bonne raison d’avoir commis ce double meurtre.

Ce que j’en pense :

À peine commencé je me suis retrouvée au cœur d’un Cluedo coréen avec un avocat qui ressemblait étrangement à Colombo, toujours à fouiner partout, en posant des questions dérangeantes aux suspects et possédant un flair extraordinaire.

Il est clair que face à un tel cas de figure, l’enquête ne va pas être facile à résoudre.

Mais on peut compter sur la persévérance de ce duo, flic avocat pour obtenir satisfaction.

Tout comme ce double meurtre, ce roman bien ficelé, qui ne manque pas d’énigmes à résoudre, ravira tous les fans du jeu Cluedo, ou des enquêtes de la reine du crime Agatha Christie

Un nouveau menu à la sauce Coréenne qui s’ajoute à la carte des éditions Matin Calme.

Pour info :

Do Jinki a 48 ans. Depuis vingt ans, il est juge au tribunal du district nord de Séoul. À quarante ans, il est devenu écrivain à succès de romans policiers. En 2010 son premier polar reçoit le Mystery Rookie Award de la Korean Mystery Artists Association. Il sera suivi par neuf autres romans policiers en deux séries parallèles, l’une mettant en scène l’avocat Gojin, l’autre le juge Djingi. En 2014, il obtient le Koreen Mystery literary Award pour son long-métrage, Thé. Statof Judas. Ses romans sont notamment traduit en Chine et quatre de ses livres ont été vendus à des sociétés de production faisant la part belle aux rebondissements. Ses fans l’ont baptisé le « John Grisham de Corée».

Je remercie les Éditions Matin Calme et l’agence Trames pour ce nouveau menu Coréen qui ne manque pas d’énigmes.

Ça fait longtemps qu’on s’est jamais connu

Ça fait longtemps qu’on s’est jamais connu de Pierre Terzian aux Éditions Quidam

” J’aime quand tu m’appelles Pierre, Gaëtan. Et j’aime quand tu me dis « Bon matin ». On n’a pas ça chez nous, « Bon matin ». C’est pour ça qu’on a des matins de merde. La bonne humeur québécoise, c’est quelque chose. C’est bien plus qu’une curiosité touristique. C’est un impératif moral, quasi religieux, un truc de pionnier. « Le cœur vaillant et débonnaire de notre peuple» m’a dit le daron de ma blonde, la première fois que je l’ai rencontré. Ça fout la pression. Tu te sens tout petit tout laid avec ta grosse massue plaintive. Souvent je me paie le soupir-massue, celui qui me caresse le plexus, qui m’aide à me sentir en vie. Quand il n’y a plus de beurre, quand le recyclage déborde. Raaaaa. Je jette mon grand froid sur la cuisine et ses habitants. Ma femme, ça la révolte. Elle me demande si je viens d’apprendre que j’ai le cancer. Elle veut me faire mal, la bitch. Elle trouve ça laid. Elle a pas tort. Faut tenir debout, question de culture. Avec leur « Bon matin », c’est radical, t’as l’impression de mettre le pied dans une comédie musicale. Tout devient rose et vert pastel et les décors se mettent à bouger. “

Qu’est-ce que j’ai bien fait de commencer de « Bon matin » ce roman qui de premier abord m’attirait moyennement. Mais comme on dit en France « Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis».

Tabernak qu’il fut bon ce moment de procrastination intense, car évidemment une fois commencée cette aventure québécoise je ne l’ai quittée qu’une fois terminée et bien sûr à regret.

Pierre, un français bien de chez nous, a suivi sa blonde, sa belle québécoise à Montréal, et en attendant de trouver l’inspiration pour son prochain roman, il devient remplaçant en garderie. Lui qui n’a pas encore d’enfant, ça risque d’être drôle.

Il n’est d’ailleurs pas le seul expatrié à faire ce boulot, il va croiser quelques français mais pas que.

Très vite il va se rendre compte que ces garderies où on l’envoie ce n’est pas des cinq étoiles, elles manquent cruellement de moyens et subissent de plein fouet les restrictions budgétaires du fameux Couillard, du coup on « ferme sa yeule et s’organise. »

À travers tous ces enfants d’horizons et de cultures différentes, on découvre une galerie de portraits très représentative du Québec dans le milieu des garderies trop souvent ignorés, avec ses moments tendres, ses mots d’enfants souvent très drôle mais parfois d’autres plus difficiles que l’on pourrait nommer les journées caca…

Un univers où se côtoient petits et grands, où les mots français, anglais, québécois virevoltent, se mélangent jusqu’à donner une langue unique et hilarante où l’amour pour les enfants dépassent toutes les frontières.

Ce fut vraiment une belle surprise, et j’ai comme on dit au Québec « ma petite crotte sur le cœur » car même si je ne travaillerai jamais en garderie, suis triste de quitter ces petites canailles et tous leurs anges gardiens qui s’occupent d’eux chaque jour en les aidant à grandir, pour que leurs vies soient pleines de « Bon matin »

« – Pourquoi les filles elle mettent du vernis à ongles et pas nous ?

– Parce que ça pue. »

( Slimane et Xavier, sexe faible);

Câlisse que c’était bien et cette langue je kiffe ♥️

Pour info :

 Pierre Terzian est un écrivain, metteur en scène de théâtre et vidéaste français, né aux Lilas, en 1979.

Il vit aujourd’hui à Montréal. Il est l’auteur plusieurs romans : dont Crevasse et de Ça fait longtemps qu’on s’est jamais connu.

Pierre Terzian s’intéresse aux combats des « invisibles ». Qu’elle soit littéraire ou théâtrale, sa démarche a toujours un ancrage social très fort, et pour ambition de rendre ses lettres de noblesses à une frange de la population souvent oubliée du monde culturel.

Une vie et des poussières

Une vie et des poussières de Valérie Clo aux Éditions Buchet . Chastel

” Un soir, il y’a quelques semaines, avant de partir, elle m’a apporté ce carnet. J’ai adoré sa couverture en cuir marron, ornée de belles fleurs colorées. Elle s’est dit qu’une ancienne journaliste devait sans doute aimer écrire. Je l’ai prise au mot et, depuis, je me suis remise à l’écriture. J’avais oublié le plaisir que c’était. “

Mathilde vient d’être placé dans une maison de retraite. Pas facile au départ de se retrouver avec tous ces vieux (comme elle dit), alors elle s’attache à Delphine, une aide soignante qu’elle baptise Maryline en souvenir de l’actrice.

 » Depuis que je suis ici, j’ai le temps de penser. Je n’ai même que cela à faire. Penser et observer. Et je peux vous assurer que ce que je vois n’est pas triste. Il y a de sacrés énergumènes qui vivent dans cet établissement. Je ne savais pas que cela pouvait exister des zozos pareils. Personne n’a idée de ce qui se passe en fin de parcours. Je crois surtout que l’on a pas envie de le savoir. On nous cache, il ne faudrait pas que l’on vienne gâcher la fête. C’est comme si on entrait dans un monde invisible. “

Même si la mémoire de Mathilde lui fait parfois défaut, elle n’en demeure pas moins lucide, et avec beaucoup d’humour elle nous raconte sa vie passée et présente à travers le journal que Maryline lui a gentiment offert. Une façon comme une autre de laisser une trace de son passé sur terre et de répondre un peu à toutes les interrogations de sa fille.

” Lorsque je regarde mes compagnons de la dernière heure, je me demande si eux aussi ont des questions sans réponses à l’hiver de leur vie. Des choses non résolues, des haines toujours vivaces, des regrets, des remords, des rancœurs ? Des histoires de famille insolvables ? Des traumatismes encore présents ? Des nœuds dans leur cœur, impossible à défaire, qu’ils emporteront avec eux dans leur tombe ? Il y en a de si coriaces qu’ils sont capables de leur survivre et de venir hanter l’âme de leurs enfants. “

Entre hier et aujourd’hui, Mathilde partage avec nous ses souvenirs douloureux de son enfance pendant la guerre mais aussi sa vie actuelle où chaque jour apporte son lot de joie et parfois de peine.

Un magnifique portrait de femme et un bel hommage à ces maisons de retraites trop souvent oubliées.

Ce que j’en dis (aussi) :

Comme chacun a pu se rendre compte, vieillir n’est pas une partie de plaisir, et lorsque l’on se retrouve comme Mathilde placée en EPHAD, ce n’est guère réjouissant, comme j’ai pu le constater à maintes reprises au cours de mon travail.

À travers ce sublime portrait de femme, Valérie Clo nous confronte à tout ce qui peut survenir en fin de vie, sans larmoiement, avec élégance, humour et beaucoup de tendresse.

De la vieillesse qu’il faut supporter, au placement en maison de retraite, à la culpabilité de la famille, à toutes ces interrogations qui persistent et tous ces souvenirs qui ont du mal à lâcher prise même quand la mémoire se défile.

Sortie avant le confinement, ce récit m’a profondément touché car il a pris suite aux événements actuels, une résonance particulière et m’a rapproché un peu plus de tous les anciens que je côtoie pour un embellissement capillaire.

D »une justesse extraordinaire, ce roman nous conforte à ne surtout pas oublier nos aînés et à saluer toutes les personnes qui prennent chaque jour soin d’eux.

Découvrez le vous aussi, avant que notre vie parte en poussière…

Pour info :

Valérie Clo vit à Meudon.

Depuis plusieurs années, elle est art-thérapeute et intervient auprès de publics en grandes difficultés.

Je remercie les Éditions Buchet Chastel pour ce roman de toute beauté.