“ Des mirages plein les poches ”

Des mirages plein les poches de Gilles Marchand, éditions Aux Forges de Vulcain

J’avais un bateau mais le bateau coulait. J’étais sur le pont, réfléchissant aux différentes options qui s’offraient à moi. Le bateau coulait et rien ne pouvait l’en empêcher. Il y avait une fuite, une avarie, un trou dans la coque, que sais-je ? Mais c’était mon bateau et les capitaines n’abandonnent pas leur navire. (…) J’en avais rêvé, de ce bateau. J’avais mis de l’argent de côté. J’en avais rêvé à mon bureau, j’en avais rêvé dans mon appartement, j’en avais rêvé dans le métro. J’avais économisé pour réunir la somme nécessaire à son acquisition. C’était un petit bateau, pas grand-chose en apparence, mais le bout d’un rêve, c’est forcément un grand quelque chose. “

Quand on s’aventure au milieu des pages des livres de Gilles Marchand, on se prépare la mine réjouie, à découvrir de nouvelles histoires où la magie s’invite avec délicatesse, à pas de velours pour vous murmurer des mots doux comme seuls les poètes ont le pouvoir.

Mot après mot, les histoires se révèlent et au détour d’une phrase avec subtilité, l’auteur délivre des messages subliminaux, tout en se moquant de certaines addictions, ou de certains comportements. Il joue à cache-cache avec nous, derrière son masque d’écrivain équipé de sa plume magique et nous mets des mirages plein les poches, des sourires sur nos lèvres et des perles de bonheur au coin des yeux.

On pourrait dire de lui qu’il est malin comme un singe, ou rusé comme un renard, et je suis certaine que La Fontaine l’aurait adoré. En attendant sous ses airs de super raconteur d’histoires, il explore des sujets sensibles avec beaucoup d’élégance et de poésie, que ce soit pour les phobies, le deuil, la séparation, l’apparence, le manque de confiance, le désir de fonder une famille, d’être le meilleur père ou être un super héros même en amour, sans jamais être moralisateur mais en restant un grand rêveur, la tête dans les nuages mais les deux pieds sur terre.

J’aurais pu prendre la grosse tête, mais je ne savais pas trop ce que je devais à mes chaussures qui couraient vite et à mes slips qui faisaient bien l’amour. “

Une chose est sûre, il utilise des stylos qui écrivent de belles histoires, qui ne manquent ni d’amour ni d’humour dont il serait dommage de se priver.

” Je ne voulais pas partir sans dire à ceux que j’ai aimé que je les avais aimés. J’espère qu’il le savent. Je n’ai pas visité tous les continents, je n’ai pas gravi de hautes montagnes. Mais j’ai connu l’amour. J’ai toujours préféré aux vertiges des cimes ceux de l’amour. Après la chute, on s’en relève et un jour on se reprend à rire. J’ai beaucoup aimé et j’ai beaucoup ri. De quoi partir sans regret. “

Si l’auteur trouve les mots et rivalise de fantaisie et d’imagination pour nous offrir ces bonnes nouvelles, je n’en ai pas 36 pour lui dire que je les ai adoré, à moins d’utiliser toutes les langues de la planète.

Comme ci-dessous :

À votre tour de découvrir ces délicieuses nouvelles et de rêver, un peu, beaucoup, à la folie…

Pour info :

Gilles, moi-même et son éditeur David

Gilles Marchand est écrivain et éditeur.

Historien, il a publié un « Dictionnaire des monuments de Paris »(2003), une « Chronologie d’histoire de la peinture » (2002), coécrit avec Hélène Ferbos, et « La construction de Paris » (2002), scénario de la bande dessinée, aux éditions Gisserot.

En 2010, il participe à l’appel à textes du recueil « CapharnaHome » des éditions Antidata, est sélectionné, publie l’année suivante un recueil personnel dans la même maison, et devient ensuite un contributeur régulier des anthologies thématiques Antidata. Il signe en 2011 « Dans l’attente d’une réponse favorable, 24 lettres de motivation » chez Antidata, où il a aussi été éditeur.

En 2011, Il imagine également deux novellas postales pour Zinc Éditions, « Green Spirit » et « Les évadés du musée ».

Son premier roman, « Le Roman de Bolaño » en 2015, écrit en collaboration avec le critique littéraire et auteur Éric Bonnargent, éveille la curiosité de la critique par sa structure inhabituelle.

Son premier roman solo, « Une bouche sans personne » en 2016, (ma chronique ici) attire l’attention des libraires et de la presse. Il est notamment sélectionné parmi les « Talents à suivre » par les libraires de Cultura et remporte le prix des libraires indépendants « Libr’à Nous » et le prix Hors Concours en 2017.

En 2017, il publie « Un funambule sur le sable »( ma chronique ici).

Il a été batteur dans plusieurs groupes de rock et a écrit des paroles de chansons. Il est également rédacteur au Who’s Who, et chroniqueur littéraire au sein du webzine k-libre.

Je remercie les Éditions Aux forges de Vulcain pour ce voyage fantastique au cœur de l’âme humaine ❤️

 » Pills Nation « 

Pills Nation d’Adrien Pauchet

Aux Éditions Aux Forges de Vulcain

Avec la collaboration de François Szabowski et Hugues Girard

 » – Alors tu es encore revenue… Je te croyais plus raisonnable

– Que veux-tu. Il n’y a pas d’âge pour être une Junkie répondit Suzanne d’amour espiègle. « 

Stone, le monde est stone pendant cet été caniculaire à Paris. Les gens tombent comme des mouches et si le taux de mortalité continue de grimper, les places au cimetière risquent de se raréfier. Mais en fait la canicule à bon dos et arrange bien les affaires de certains.

 » Cela n’avait pas été facile. Mais même les gens les plus intègres font parfois des entorses à leurs principes, quand c’est pour la noble cause.  »

Une nouvelle drogue a vu le jour, on la surnomme l’Orphée. Une drogue étrange et hors de prix .

 » – Tu sais ce qu’ y a toi, dans ces gélules ?

– J’sais pas. Quand Yacouba m’en a parlé, j’ai cru qu’y se foutait de moi. Mais quand je vois la gueule des clients.  »

Mais d’où vient donc cette drogue qui ressemble à du dafalgan, de la même couleur à une petite exception prêt et te ferait presque oublier ta douleur, mais là en l’occurrence plutôt la douleur morale que physique puisqu’elle permet de mettre ta période de deuil en sommeil et de dire un petit bonjour à tes proches disparus…

Mais attention danger, en plus de coûter un bras , c’est illégal donc pas remboursé par la sécu et en plus à t’aventurer du côté obscur même si c’est tendance en ce moment tu risques d’y laisser ta peau … Mais c’est clair que pour les dealers c’est une mine d’or tous ces morts qui ne s’attendent pas à cette petite visite surprise…

 » Il repensa alors à la gélule que lui avait donné le jeune employé des pompes funèbres. Il la retrouva au fin d’ une poche, observa un instant le petit dessin sinusoïdal gravé sur le cylindre, puis s’allongea sur le canapé et l’avala, avec l’espoir de passer au moins quelques heures de calme.  »

Caroline, capitaine de Police est sur cette enquête. Elle a un train d’avance sur ses collègues, elle connaît l’Orphée même si maintenant elle est plus copine avec la bouteille.

Qu’ils soient flics ou dealers, jeunes ou vieux, riches ou paumés, ils vont tous se retrouver vers une descente en enfer aussi vite que monte la température sous ce soleil de plomb. Une ambiance mortelle au pays des vivants pour avoir mis les pieds un peu trop tôt au paradis.

À travers ce polar qui frôle le fantastique on découvre un récit assez original, très rythmé et plutôt addictif.

Une fiction où se pointe à l’horizon un aperçu du futur si les manipulations génétiques venaient à perdurer. Une manière singulière de dénoncer ses dangers.

La mort omniprésente conduit les personnages vers le deuil qu’ils sont contraints d’accepter quitte à se faire aider par une pharmacie peu ordinaire, histoire de faire passer la pilule. Une façon détournée de montrer du doigt le reflet de la société sans en avoir l’air.

Un roman qui s’avale d’une traite, sans danger apparemment puisque je peux encore vous en parler. Et en temps que dealer moi même, je ne peux que vous encourager à vous pencher sur ces lignes atypiques.

Une couverture surprenante qui met en bouche et donne un véritable aperçu du contenu.

Adrien Pauchet est né en 1988. Voyageur paresseux et fondateur de la société de production orange verte, il écrit les histoires qu’il souhaiterait tourner. Pills Nation est son premier roman.

 » Un funambule sur le sable « 

Un funambule sur le sable de Gilles Marchand aux Éditions Aux forges de Vulcain 



«  Bonjour, je m’appelle Stradi.  » 



Stradi n’est pas un enfant comme les autres, il est né avec un violon dans la tête. Privé pendant longtemps du cursus scolaire, il rejoint enfin le chemin des écoliers. Il va devoir se confronter à l’attitude,  pas toujours très cool, des petits et des grands face à son handicap.

 » À la maison, la douleur avait pris beaucoup de place Et mon violon était toujours perçu comme un ennemi qui s’était incrusté de force et avait un bémol à l’harmonie du foyer. Pour Max, il était le vecteur de mon anormalité, mon handicap. Pour Lélie, il s’agissait d’un drôle de don.  » 




Malgré tout, Il est un pro de l’optimisme et va transformer cette malédiction en atout, c’est clair que ce n’est pas donné à tout le monde de communiquer avec les oiseaux. Qui n’en rêverait pas ? 

 » Mais il jouait juste. C’était ma manière de me réconforter. Cela aurait pu être pire. J’imaginais le calvaire que ma vie aurait été si mon violon n’avait eu aucun sens du rythme ou de la mélodie, s’il avait massacré chaque morceau que j’écoutais. Dans mon malheur il m’avait au moins épargné. « 



Sans jouer du violon, ni du pipeau, il va rencontrer l’amour. Son doux prénom, Lélie, fait chavirer son cœur. Ils vont s’aimer, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, plus du tout…


C’est ça l’amour, même avec un violon dans la tête qui joue la sérénade. Mais Il n’a pas joué sa dernière note. D’autres partitions restent à venir.


 » Un matin alors que mon frère et moi étions sur le point de partir au collège, le facteur a glissé un courrier des États – Unis dans notre boîte aux lettres. Il y est tombé comme tous les courriers, sans faire de manière, sans pousser des cris de cow-boy ou de trader de Wall Street.  » 

À l’âge adulte, Stradi va se heurter à de nouveaux problèmes. Trouver un boulot entre autre. Et ça va pas être simple. 

 » La société avait établi tout un tas de règles mais n’avait rien prévu pour les gens qui n’étaient pas capables de les suivre pour des raisons indépendantes de leur volonté. Elle les acceptait mais ne leur donnait pas une réelle chance à part de rester bien sagement assis sans trop dérangé et surtout, surtout sans oublier de dire merci.  » 

Mais n’oublions pas que notre Stradi à de la ressource, des idées, et des notes plein la tête, alors en avant la musique. 

 » Et je comprenais aujourd’hui, que les vrais héros ne sont pas ceux qui ont des supers pouvoirs, mais ceux qui en sont démunis et continuent d’avancer. « 



Gilles Marchand est un magicien. Avec seulement vingt-six lettres il crée des mots, qui mis bout à bout te donne une histoire pleine de charme, de douceur et de poésie. À sa façon, il arrive à transformer le tragique en comique. Il te fait rêver et t’emmène dans son univers plein de fantaisie où son imagination te redonne ton âme d’enfant, dessine des sourires sur tes lèvres et transperce ton cœur. Des milliers d’étoiles plein les yeux, tu te laisses porter page après page dans ce récit hors du commun. 



Après ma découverte « d »Une bouche sans personne  » ( Ma chronique Ici ), j’étais impatiente de découvrir  » Un funambule sur le sable « . Un roman qui, sous ses airs musicaux nous livre un certain regard sur l’handicap, un roman sur la différence totalement innovant qui dégage de belles émotions et réveille notre imagination. Un texte aussi puissant qu’une partition, aussi doux qu’un slow, aussi fort qu’un rock. 

Une belle leçon d’éducation pour tout ceux qui sont bourrés de fausses notes. Un concert de mots absolument réussi où résonne l’optimisme, le courage, la fantaisie, l’amour, l’amitié. Un véritable feu d’artifice pour le cœur. 

À lire, à offrir, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie … 



Gilles Marchand est né en 1976 à Bordeaux. Son premier roman Une bouche sans personne, est paru en 2016 et a rencontré un grand succès. Il a notamment été le lauréat du Prix Libr’à Nous 2017. 

Un auteur à suivre absolument. 

je remercie David des Éditions Aux Forges de Vulcain pour cette lecture qui m’a remis le cœur à l’endroit. Et un grand merci à Gilles, qui fait de moi une super-woman à travers ce récit magnifique. 


 » Les rumeurs du Mississippi « 

Les rumeurs du Mississippi de Louise Caron aux Éditions Aux forges de vulcain



 » On m’a privée de la vérité au profit d’une fausse sérénité…

J’ai décidé de me battre avec des mots, non pas clandestinement sur des tracts comme l’avait fait mon père, Mais à la une des journaux. « 


Sara Kaplan est journaliste au New-York Times. Un jour, elle reçoit une lettre confession d’un homme qui s’accuse d’un crime pour lequel un autre homme, Chayton Cardello, est sur le point d’être exécuté.

 » Dans la soirée du 4 juillet 2008, j’ai étranglé une fille à l’odeur épicée, aux yeux comme des trous noirs, près du lac à quelques miles de notre ranch. Quand le shérif adjoint s’est pointé chez nous le lendemain, ma mère l’a embobiné d’un mot, d’un regard, d’un sanglot. Du coup il m’a laissé tranquille. »


Cet homme qui s’accuse s’appelle Niko Barnes, un vétéran de la guerre d’Irak. Il se considère comme un homme SANS: sans diplôme, sans fortune, sans femme, sans amis, sans le moindre espoir que ça s’arrange. 

Sara Kaplan se met en devoir de lever le voile sur ce mystérieux coupable et part enquêter, là où a eut lieu l’assassinat. Elle va y mener un véritable travail d’investigation. Cette affaire lui tient à cœur, son père était lui aussi vétéran de guerre. Il a longtemps souffert de symptôme Post- traumatique avant que cela finisse en tragédie.



 » On devrait pouvoir se dépouiller de sa mémoire sans traîner des chagrins qui vous entravent. »

Elle recueille un bon nombre de témoignages et pas mal de confidences, les langues se délient. L’affaire Barnes / Cardello ranime les souvenirs, chacun règle ses comptes avec le passé. Même Sara Kaplan tente de régler les siens.



 » À la suite, j’avais noté Et souligné : Sara arrête de vouloir régler tes comptes avec l’armée. »

Cette affaire réveille sa colère contre l’armée américaine. Son acharnement ne plaira pas à tout le monde, mais sa détermination n’aura pas de limite.



 » J’avais de nouveau rendez-vous avec le manque. J’apprenais à apprivoiser la douleur. Tapie dans mon corps, elle me minait. À cela s’ajoutait l’incertitude de l’avenir. « 

Louise Caron nous offre bien plus qu’un roman. À travers cette histoire, ce portrait de femme battante, elle nous livre une réflexion sur les dégats de la guerre sur l’homme, ses traumatismes. Véritable sujet tabou aux états-Unis où le nombre de suicides chez les vétérans de guerre ne cesse d’augmenter. Une vraie épidémie, qui fait plus de morts que la guerre elle-même. L’auteur  pose également un regard réaliste et poignant sur un coin de l’ Amérique profonde.

Des phrases percutantes, un style brillant, éloquent, plaisant et ce n’est pas quelques petites imperfections qui enlèveront sa qualité au récit.

Quand les mots vous parlent, quand les mots vous touchent, au point de ne pas quitter le roman avant la fin, même quand les émotions se libèrent et vous brouillent la vue.

Belle couv’, belle plume, beau style, une histoire qui respire l’authenticité, un très beau et grand moment de lecture.


Louise Caron est Docteur en neurobiologie et en biochimie, comédienne, metteur en scène, auteure.
Elle entame, en 1983, une formation de comédienne au théâtre-école de Montreuil.
En 2007, elle quitte Paris pour les Cévennes. Depuis, elle consacre son temps à l’écriture et au théâtre.
Son premier roman, « Se départir », est paru en 2012. Sa pièce « Comme un parfum d’épices dans les odeurs de menthe », lauréate du prix d’écriture théâtrale « NIACA » en 2012, a été publiée en septembre 2014.
En 2015, elle publie « Chronique des Jours de cendre » puis en 2017, « Les murmures du Mississippi ».


Une auteure à suivre.

Je remercie David des Éditions aux forges de Vulcain pour cette lecture vibrante.