Goodbye, Loretta de Shawn Vestal aux éditions Albin Michel
Collection Terres d’Amérique
Traduit de l’américain par Olivier Colette
Dans les années soixante-dix en Arizona, au sein d’une communauté de mormons vit Loretta, une jeune fille de quinze ans.
Pas facile de vivre une adolescence épanouie avec toute la rigueur imposé par le code moral de cette congrégation qui met l’accent sur la famille, ne consomme ni alcool, ni tabac, ni café et jeûne un jour par mois.
Chaque soir elle fait le mur et rejoint son petit ami, jusqu’au jour où son père la surprend et décide de la marier de force à Dean Harder, un homme de trente ans ans de plus qu’elle, déjà marié et père de sept enfants.
” Pour Loretta, cette partie de la journée est la pire, car elle lui rappelle clairement qu’aucune parcelle de sa vie ne lui appartient. “
Loretta se glisse dans ce nouveau rôle qu’on lui impose, d’« épouse-sœur » mais s’accroche à ses rêves.
” Ce que Loretta croyait impossible s’est révélé simple, aussi simple que cette vie. Elle se rappelle s’être demandé comment elle allait cacher sa vraie personnalité, avant de découvrir que c’était un jeu d’enfant, puisque personne ne lui posait jamais de questions sur elle-même.
D’ailleurs, ce soir, quand Dean viendra dans sa chambre, ce sera pareil, en plus intense. Ce n’est pas elle qui sera avec lui, mais son ombre, et ce ne sera pas la fin du monde, juste un obstacle de plus qu’elle franchira en se retirant en elle-même. La chair ne lui fait pas peur. “
La chance de fuir cette vie se présente finalement sous les traits de Jason, le neveu de Dean. Une nouvelle aventure commence aux allures de road trip qui les mènera peut-être vers le chemin de la liberté tout en faisant face à la dure réalité.
Ce que j’en dis :
C’est toujours avec un certain plaisir que je me plonge dans un roman de la collection Terres d’Amérique. Pour avoir croisé la route de mormons lors d’un voyage j’étais loin d’imaginer à quel point leurs vies pouvaient être si particulière malgré un vague aperçu qui m’avait laissé assez stupéfaite.
Ce roman nous offre une immersion fascinante dans leurs communautés plutôt méconnues, durant les années 70. Un monde à part. On y découvre leur quotidien, leurs mœurs, leurs croyances, la polygamie à travers les yeux de Loretta, une jeune fille qui tente de s’émanciper de la vie qu’on lui impose.
On y croise également d’autres personnages assez surprenant et même dérangeant, des hommes qui se disent croyants mais se laissent pervertir par l’argent et n’hésitent pas à exploiter physiquement et sexuellement des femmes-enfants.
Un premier roman qui sort de l’ordinaire tout à fait séduisant, qui nous embarque au cœur de la mythologie de l’Ouest Américain, tant sacrée que profane.
Une très belle découverte.
Shawn Vestal s’est fait connaître par ses nouvelles, d’abord publiées dans de célèbres revues littéraires puis réunies dans un recueil intitulé Godforsaken Idaho (non traduit en français), qui a été récompensé par le PEN/Robert W. Bingham Prize. Il est par ailleurs éditorialiste pour The Spokesman-Review. Goodbye, Loretta est son premier roman.
Je remercie les Éditions Albin Michel pour ce voyage aux allures Vintage.