L’usine à lapins

L’usine à lapins de Larry Brown aux Éditions Gallmeister

Traduit de l’américain par Pierre Furlan

” Le canon du pistolet s’approcha à quinze centimètres de sa cible. Peut-être l’homme dans le fauteuil s’était-il endormi, ou du moins, s’était-il laissé emporter par les effluves parfumés des lotions du coiffeur. Le pistolet fit feu, un sang écarlate gicla sur le coiffeur silencieux. Le choc de la détonation réduisit un instant la musique en silence. “

Pendant qu’un homme se fait descendre dans un salon de coiffure, Arthur la soixantaine tente d’adopter un chaton pour sa femme, Helen, histoire de l’attendrir un peu, n’arrivant plus à la satisfaire au pieu. Perturbé par son impuissance, il craint de la perdre, son épouse étant beaucoup plus jeune que lui. Ce n’est pourtant pas un cadeau, elle est alcoolique, nymphomane et le trompe sans scrupules dès que l’occasion se présente.

” Arthur se demanda pourquoi cet histoire de chat devait s’ajouter à tous les autres problèmes – celui de ses érections et celui de l’alcoolisme d’Helen. Il se disait qu’un souci à la fois aurait dû suffire. Helen avait besoin d’aide, mais elle ne voulait pas en entendre parler. “

C’est en se rendant dans une animalerie qu’il va faire la connaissance d’Eric et de son inséparable Pit- bull.

Autour d’eux gravitent des loosers, hauts en couleur, poursuivis par la poisse, mais aussi par les flics. Ils se démènent pour survivre dans ce sud crasseux, tout en cherchant désespérant l’amour.

Jusqu’à ce qu’une collision accidentelle sème le chaos et entraîne cette contrée dans un véritable bain de sang.

” Et merde, où étaient les flics quand on avait besoin d’eux ? “

Ce que j’en dis :

C’est ma troisième excursion livresque dans les écrits de Larry Brown, et penser qu’un jour mes découvertes prendront fin puisque malheureusement il a quitté ce monde est toujours un déchirement.

Comme d’autres auteurs américains que j’affectionne particulièrement, il avait le talent pour nous offrir des romans noirs où les désespérés, les poissards, les bouseux, les laissés pour compte, étaient mis en lumière dans les coins les plus reculés des États-Unis. Les oubliés de l’Amérique étaient ses stars.

L’usine à lapins son dernier roman, auparavant publié chez Gallimard en 2005 et chez folio en 2008, fait dorénavant partie de la collection totem de chez Gallmeister avec une traduction révisée. Les fans de Larry Brown et de cette maison d’édition ne peuvent que se réjouir.

Derrière cette couverture, assez cocasse, se cache une petite merveille où les bêtes volent parfois la vedette aux humains et se révèlent même parfois bien plus malignes et moins dangereuses malgré les apparences.

L’histoire a beau être très sombre, parfois assez violente, on s’attache à chacun des personnages plus désespérés les uns que les autres. On comprend aisément leurs penchants pour l’alcool et autres substances illicites qui les aident certainement à supporter ces vies de merde. (N’ayons pas peur des mots, on n’est pas chez Disney, mais dans le Mississippi de Larry Brown.)

Et malgré la violence véhiculée dans cette histoire, malgré les rêves brisés, et les âmes perdues, ce récit absolument irrésistible fait sourire assez sournoisement.

Alors même si l’usine à lapins est dorénavant fermée, il ne tient qu’à vous de la faire revivre en vous plongeant dans cette histoire aussi succulente qu’un bon civet.

Des hommes, des femmes, des bêtes, de la picole, de la fumette, et même du sexe, et ouais tout y est, alors surtout ne tardez pas trop, ce serait dommage de passer votre chemin et de rater cette incontournable escapade américaine.

Pour info :

Larry Brown (1951-2004) est né et a vécu dans le Mississippi, près d’Oxford. Passionné par la pêche, la chasse et la lecture plus que par les études, il a exercé des métiers aussi divers que bûcheron, peintre en bâtiment ou droguiste, puis pompier pendant dix-sept ans, avant de se consacrer uniquement à la littérature. Il est le seul écrivain à avoir reçu à deux reprises le prestigieux Southern Book Award for Fiction.

Je remercie les éditions Gallmeister pour cet irrésistible aventure américaine.

Dry Bones

Dry Bones de Craig Johnson aux Éditions Gallmeister

Traduit de l’américain par Sophie Aslanides

” Ils se tournèrent tous les deux vers moi. J’étais plongé dans la contemplation du cadavre.

– Walt ?

J’avais déjà vu cet homme, dans mes rêves.

– Walt ?

Dans les rêves, il n’avait pas d’yeux non plus.

– Walt.

Les paroles de l’homme me revinrent et c’était presque comme s’il se trouvait à côté de moi, répétant l’avertissement incantatoire que j’avais gardé tout au fond de ma mémoire : Tu contempleras le bien mais tu verras aussi le mal. Les morts ressusciteront et les aveugles verront. “

Dans le comté d’Absaroka dans le Wyoming, un vieil indien vient d’être retrouvé mort, faisant le régal des tortues aquatiques à l’endroit où son corps a échoué.

Walt Longmire est évidemment sur l’affaire. Il connaissait le vieil homme et cette mort lui rappelle un de ces rêves. Étrange coïncidence ou prémonition, allez savoir, avec Walt on peut s’attendre à tout sauf à l’ordinaire.

Walt n’est pas un shérif comme les autres…

” – Il y a longtemps, le précédent shérif m’a transmis son étoile. (Je lui montrai d’un signe de mon pouce – peut-être n’en avait-il jamais vu de sa vie.) Et avec ce morceau de métal de sept ou huit centimètres, on m’a confié la responsabilité de veiller sur mes administrés, tous mes administrés, les 2483 d’entre eux. “

En attendant, voilà une mort qui arrange certaines personnes et d’autres beaucoup moins.

“ Voilà qui va introduire un aspect criminel fâcheux dans cette affaire.  »

Le FBI a remplacé les tuniques bleues, il y a dorénavant plus de chefs que d’indiens, et le shérif a échangé son cheval contre un pickup, mais l’affaire n’en demeure pas moins compliqué et tout ça à cause d’un tyrannosaure, qui l’eut cru ?

” Sauvez Jen. “

Walt ne change pas, toujours décidé à résoudre aux mieux les affaires. C’est accompagné du vieux Shérif Lucian Connally et de son plus fidèle ami, l’infatigable Indien Henry Standing Bear qu’il se lance dans une poursuite assez périlleuse et souvent imprévisible sans jamais perdre son humour mordant.

Ce que j’en dis :

En 2009 je découvrais Little Bird, et je faisais la connaissance de Walt Longmire et des éditions Gallmeister. Depuis je suis devenue accro à toute la came de cette maison et je suis restée fidèle à Craig Johnson et à Walt.

Dans cette nouvelle aventure, Walt a quelques rides et quelques cheveux blancs en plus mais il n’a rien perdu de son humour, même si cette fois elle est mise à rude épreuve face aux pertes humaines qui lui étaient assez proches,

Mais chut, il faut avant tout Sauvez Jen, même si elle est vieille de plusieurs millions d’années, elle vaut la peine qu’on se décarcasse pour sa carcasse.

Notre shérif et ses fidèles fantômes nous offrent une nouvelle enquête bien rythmée, pimentée d’humour, peut-être un peu plus sombre mais toujours aussi palpitante.

N’en déplaise au FBI, notre shérif n’est pas prêt de prendre sa retraite et c’est tant mieux.

Que ce soit dans l’univers littéraire ou cinématographique, Craig Johnson a su imposer Walt Longmire dans le paysage américain avec talent et réussi de ce fait à perpétrer certaines traditions indiennes, un bel hommage à ce peuple trop souvent oublié et maltraité.

Un emblématique shérif, des cow-boys, des indiens, un décor à couper le souffle de quoi faire des émules à travers le monde.

Vivement le prochain épisode…

Pour info :

Craig Johnson a grandi dans une petite ville du Midwest qui, malheureusement pour sa mère, était traversée par une voie ferrée. À l’âge de huit ans, il profite du fait que le train ralentit à chaque passage pour embarquer clandestinement. C’est sa première escapade dans le vaste monde qui s’achève lorsque son père, après avoir parcouru près de six cents kilomètres, vient le récupérer dans une gare de triage où le garnement a été repéré.

Après ses études, c’est chargé d’un sac de surplus de l’armée et d’un pistolet semi-automatique Colt que Craig se rend dans l’Ouest en auto-stop. Petit-fils de forgeron, il n’a pas de mal à se faire embaucher dans plusieurs ranchs du Montana et du Wyoming, et il fait même quelques incursions dans l’univers du rodéo. Il ne se débrouille pas trop mal aux épreuves de dressage, mais son lancer de lasso est assez minable.

Par la suite, il se balade pas mal à travers les États-Unis après l’obtention d’un doctorat d’études dramatiques, il devient pêcheur professionnel, chauffeur routier, charpentier ou cow-boy. Il enseigne également à l’université et fait un temps partie de la police de New York avant de se consacrer pleinement à l’écriture.

Son premier roman, Little Bird (The Cold Dish en VO), paraît en 2005 aux États-Unis. Il met en scène le shérif Walt Longmire et constitue le premier volet d’une saga qui compte à ce jour douze titres et fait régulièrement partie des listes de best-sellers aux États-Unis. Le douzième roman de la série y a été publié au printemps 2016.

La série Longmire, adaptation télévisée de l’univers de Craig Johnson, a connu un immense succès aux États-Unis. Elle est diffusée en France sur la chaîne D8.

Craig vit avec sa femme, Judy, au pied des Bighorn Mountains, dans le Wyoming. Son ranch est situé à la confluence des rivières Clear Creek et Piney Creek, à la sortie de Ucross, population 25 habitants. Il n’y a pas de voie ferrée.

Je remercie les Éditions Gallmeister pour cette aventure dans le Wyoming avec mon shérif préféré.

Ne t’enfuis plus

Ne t’enfuis plus d’ Harlan Coben aux Éditions Belfond

Traduit de l’américain par Roxane Azimi

– Et si je lui donnais de l’argent pour la faire taire ?

Et la fille ricana :

– C’est John Lennon qu’on assassine une deuxième fois.

Certains passant jetaient des pièces dans l’étui de la guitare, mais la plupart restaient à distance ou s’écartaient en grimaçant, comme s’il avait capté des effluves peu ragoûtants. (…)

Simon fixait des yeux la mendiante qui massacrait l’héritage de John Lennon. Les cheveux emmêlés, les joues creuses, elle était maigre comme un clou, sale,en haillons, cassée, perdue, sans toit ni loi.

C’était aussi sa fille. Paige.

Cela fait six mois que Paige avait disparu, six mois qu’il la cherchait. Et la voilà, devant lui, au cœur de Central Park.

Mais hélas, elle n’est toujours pas décidée à rentrer avec Simon, son père, préférant s’enfuir une fois encore.

Simon est anéanti une fois de plus, mais cette fois il est bien décidé à ne rien lâcher quitte à mettre sa famille en danger.

Il est loin d’imaginer jusqu’où son enquête va le conduire et lui révéler bien plus qu’il ne souhaitait savoir.

De Manhattan au Bronx, en passant par une ferme pittoresque du Connecticut, il va découvrir l’univers des gangs et de la drogue, et même le milieu sectaire dans un endroit bien gardé où semble se cacher de mystérieux secrets de famille.

Ce que j’en dis :

Cela faisait un bail que je ne m’étais pas aventurée dans un roman à suspens d’Harlan Coben, et c’est sans surprise que je me suis retrouvée après quelques pages, captivée par cette histoire. Toujours fidèle à son style, il nous entraîne dans un labyrinthe semé d’intrigues qu’il disperse petit à petit à chaque chapitre ce qui amène le lecteur à tourner les pages de manière addictive.

Une nouvelle enquête qui tient ses promesses sans être pour autant le livre de l’année.

Un moment de divertissement agréable, idéal lorsque l’on a besoin d’une petite récréation livresque.

Les fans de l’auteur seront comblés.

Pour info :

Né en 1962, Harlan Coben vit dans le New Jersey avec sa femme et leurs quatre enfants.

Diplômé en sciences politiques du Amherst College, il a rencontré un succès immédiat dès la publication de ses premiers romans, tant auprès de la critique que du public.

Il est le premier auteur à avoir reçu le Edgar Award, le Shamus Award et le Anthony Award, les trois prix majeurs de la littérature à suspense aux États-Unis. Depuis Ne le dis à personne… (2002) – récompensé du prix des lectrices Elle et adapté avec succès au cinéma par Guillaume Canet –, Belfond a publié vingt romans de Harlan Coben, dont Une chance de trop (2004 et 2015) et Juste un regard (2005 et 2017), tous deux adaptés en minisérie sur TF1. En 2018, il a développé les  huit épisodes de la série Safe diffusée en mai sur C8 et Netflix, avant de signer un contrat d’exclusivité avec la plateforme de streaming américaine prévoyant l’adaptation de 14 titres déjà existants et de futurs projets en séries et film, dont Ne t’enfuis plus. Tous ses ouvrages sont également disponibles chez Pocket.
 

Je remercie les Éditions Belfond pour cette excursion américaine palpitante.

“ Un insaisissable paradis ”

Un insaisissable paradis de Sandy Allen aux Éditions Belfond

Traduit de l’américain par Samuel Sfez

” Peut-être cette histoire était-elle un délire. Peut-être était-ce un mensonge. Ou peut-être Bob poursuivait un but précis. Par exemple, imaginais – je, peut-être qu’il était en colère contre son père et qu’il avait écrit cette histoire peu flatteuse pour se venger. (Si tel était le cas, je n’appréciais pas du tout qu’il cherche à m’impliquer.) (…) J’ai arrêté de lire. Le manuscrit me regardait. Il était hideux, même de loin. Ses pages puaient, littéralement. Je voulais l’ignorer, comme on ignore un tas de manteaux imbibés d’urine sur le trottoir ou un homme qui hurle des obscénités sur un banc. J’ai remis les pages dans leur enveloppe et l’ai glissé dans un tiroir que j’ouvrais rarement. “

En 2009, lorsque Sandy Allen reçoit dans une grande enveloppe, ce qui semble être l’autobiographie de son oncle, elle est assez surprise.

Son oncle a toujours été aux yeux de la famille, un être à part, étrange, et même considéré comme fou pour certains.

Jesuis Robert

C’est l’histoire vraie d’un garçon qui a grandi à berkeley californie pendant les années soixante et soixante-dix, incapable de s’identifier à la réalité et pour ça étiqueté schizophrène paranoïaque psychotique pendant le reste de sa vie. “

Comme on choisit un exécuteur testamentaire, Robert a choisi, Sandy sa nièce pour réécrire son histoire.

À travers ces feuillets, elle découvre l’histoire de ce gamin, fan de Jimi Hendrix, dont l’existence a basculé en 1970 après avoir été enfermé sans raison dans un hôpital psychiatrique. Isolé du monde, bourré de narcotiques, subissant même des électrochocs, il sera au final déclaré schizophrène.

 » Au réveil, il faisait la queue pour prendre des cachets, mangeait puis errait. Il faisait la queue pour reprendre des cachets, mangeait puis errait jusqu’à ce qu’il soit l’heure de dormir. Il se réveillait, faisait la queue pour prendre des cachets et ainsi de suite. Ce n’était pas des décisions qu’il prenait ; juste des choses qu’il faisait. Il n’y avait personne à combattre. Aucune raison de vivre. Pour autant qu’il sache, ça pouvait bien être le reste de sa vie. “

Sandy, réécrit l’histoire, tout en menant une véritable enquête sur sa famille qui semble avoir voulu cacher tout ce qui se rapporte à son oncle, mais également sur cette maladie pleine de mystère, dont on ignore tout. Une maladie qui isole, et laisse en marge de nombreuses personnes comme Robert.

Ce que j’en dis :

Sandy Allen ne s’est pas contentée de retranscrire l’histoire de son oncle, elle a mené une véritable enquête au sein de la famille et dans le milieu médical pour comprendre et analyser au plus juste le comportement de son oncle atteint de schizophrénie.

Elle démêle de ce fait le vrai du faux et mène de véritables recherches qui démontrent également les travers de la médecine face à cette maladie si méconnue à l’époque.

Bien plus qu’une biographie, Sandy Allen fait de cette histoire un véritable cas d’étude sur la schizophrénie, et le milieu psychiatrique à travers les âges.

En alternant, les feuillets de Robert et son analyse personnelle issue des ses investigations, Sandy Allen nous offre un récit atypique, passionnant en nous plongeant au cœur de la vie de Robert, tout en nous faisant part de ses découvertes parfois surprenantes.

Après lecture de cette histoire vraie aussi intéressante que bouleversante, je me demande encore si le destin de Robert aurait pris une autre tournure s’il n’avait pas été hospitalisé ce fameux jour, qui pour moi a tout déclenché, et plongé la vie de cet enfant vers d’insaisissables paradis.

À découvrir absolument.

Une découverte extraordinaire.

Pour info :

Sandy Allen, qui souhaite être identifié.e par le pronom iel٭, est un.e auteur.e de non-fiction, résidant dans les montagnes de Catskills. Son premier livre, Un insaisissable paradis, a été publié en janvier 2018 par Scribner, maison d’édition américaine.

Iel était auparavant chroniqueur.se pour BuzzFeed News.

Ses essais et ses reportages ont notamment été édités par BuzzFeed News, CNN Opinion et Pop-Up Magazine. Iel a également fondé et dirigé la revue littéraire pureplayer et trismestrielle Wag’s Revue.

Son travail cible essentiellement le système de santé mentale américain actuel, son histoire ainsi que ses évolutions ; mais aussi la notion de « normalité », en particulier ses constructions, incluant le handicap mental et le genre.

٭ Iel : pronom servant à désigner des personnes qui ne s’inscrivent pas dans un genre binaire.

Je remercie les Éditions Belfond pour cette formidable lecture.

“ Les Amazones ”

Les amazones de Jim Fergus aux Éditions Le Cherche Midi

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Jean-Luc Piningre

Pour ce qui est de notre histoire, je la raconterai à ma manière. Et il ne s’agit pas du « reste » de l’histoire, ce qui impliquerait une fin, mais simplement de nouveaux épisodes, de longue piste qui sinue ici et là. “

Molly Standing Bear, digne descendante de May Dodd, poursuit l’histoire de son peuple Cheyenne que l’on avait découvert à travers 1000 femmes blanches.

En se servant des carnets de May Dodd et de Molly McGill, un héritage précieux, elle partage avec nous les souvenirs de ces femmes extraordinaires, de véritables héroïnes.

” Selon les récits de nos aïeules, notre peuple comptait autrefois des guerrières qui, comme dans d’autres sociétés, étaient aussi vaillantes qu’eux sur le champ de bataille. C’est de leur exemple que je m’inspire. “

Du dix-neuvième siècle à nos jours, les cœurs vaillants, ces guerrières amazones ont continué la lutte, et même si les combats sont moins violents au fur et à mesure que le temps passe ils n’en demeurent pas moins importants au quotidien.

Qu’elles soient du passé ou du présent, toutes ces femmes se sont unies et ont combattu pour faire face à l’oppression avec force et courage.

Et c’est avec passion, et un grand respect, en véritable conteur que Jim Fergus nous offre leurs portraits et les rends à jamais inoubliables.

Ce que j’en dis aussi :

Je dois beaucoup à Jim Fergus. C’est en lisant mille femmes blanches, que ma passion pour les indiens et la littérature américaine est née.

Son premier roman m’a envoûté et m’a embarqué dans un univers passionnant.

En se basant sur de véritables faits historiques, il rend hommage au peuple indien, à tous ces hommes et ces femmes qui ont tant souffert d’être privé de leur terre. Il explore leurs croyances et leurs traditions à travers des personnages et des récits fantastiques.

Si ” les amazones “ clôture la trilogie  » Mille femmes blanches “, et commencent déjà à me manquer, souhaitons que les indiens ou leurs esprits continuent à murmurer à l’oreille de Jim pendant ses balades dans les grandes plaines, en terres indiennes et qu’il poursuivra en véritable passeur à nous conter leurs histoires pour que jamais ils ne disparaissent de nos vies.

Pour info :

Jim Fergus est né à Chicago en 1950 d’une mère française et d’un père américain.

Il vit dans le Colorado. 

Mille Femmes blanches était son premier roman.

Journaliste réputé, il écrit des articles sur la gastronomie, la chasse, la pêche et la nature dans les magazines Newsweek, The Paris Review, Esquire sportmen, Outdoor Life

Je remercie infiniment Léa, créatrice du Picabo River Book Club qui m’a permis de découvrir ce roman et également les Éditions Le Cherche Midi.

“ Luca ”

Luca de Franck Thilliez aux Éditions Fleuve Noir

Une fois n’est pas coutume comme on dit, je vous mets le résumé de la quatrième de couverture.

Synopsis :

Partout, il y a la terreur.
Celle d’une jeune femme dans une chambre d’hôtel sordide, ventre loué à prix d’or pour couple en mal d’enfant, et qui s’évapore comme elle était arrivée.
Partout, il y a la terreur.
Celle d’un corps mutilé qui gît au fond d’une fosse creusée dans la forêt.
Partout, il y a la terreur.
Celle d’un homme qui connaît le jour et l’heure de sa mort.
 
Et puis il y a une lettre, comme un manifeste, et qui annonce le pire.
S’engage alors, pour l’équipe du commandant Sharko, une sinistre course contre la montre.
C’était écrit : l’enfer ne fait que commencer.

Ce que j’en dis :

Il fut un temps j’étais accro aux livres de Franck Thilliez, mais apparemment ce temps est révolu.

En lisant ce thriller, j’ai eu l’impression d’être sur des montagnes russes, tantôt captivée, à fond dans l’histoire, effrayée par les menaces qui circulent sur le net et ailleurs, pour ensuite complètement décroché, un peu lasse de tout cet enchaînement de violence en tout genre comme si il fallait absolument que tout y soit de peur de manquer quelque chose. On se retrouve avec une histoire qui part dans tous les sens, les dangers des réseaux sociaux, une mère porteuse, un kidnapping d’enfant, les dérives de la génétique, les caprices de la météo, des flics traumatisés, perturbés, des événements qui sont survolés et pas assez développés à mon sens. Du coup cette lecture en dents de scie va m’éloigner encore un peu plus du monde des thrillers et de Franck Thilliez.

Je peux comprendre que certains apprécient, fort heureusement nous ne sommes pas des robots, issus du même moule et chacun est encore libre de penser et d’apprécier ou pas ses lectures. Hélas cette fois même si l’auteur aborde des sujets d’actualités assez terrifiants, je n’ai pas été emballée plus que ça.

À votre tour ou pas de vous plonger dans Luca, peut-être serez-vous plus amène de l’apprécier plus que moi.

Pour info :

Franck Thilliez est l’auteur de plus d’une dizaine de romans, parmi lesquels Atomka, Le Syndrome E et, plus récemment, Pandemia. Lauréat du prix Étoiles du Parisien-Aujourd’hui en France pour le meilleur polar 2014 avec Angor, il confirme sa place de pilier du thriller français et continue d’alterner one-shots et enquêtes menées par son couple phare Lucie Henebelle/Franck Sharko.
Adapté au cinéma pour La Chambre des morts (prix SNCF du polar français), Franck Thilliez est aussi scénariste.
En 2016, le Palais de Tokyo lui commande une nouvelle, publiée chez Fleuve Éditions, dans le cadre de l’exposition « Double Je ».
Ses livres sont traduits dans le monde entier.

Je remercie les éditions Fleuve Noir pour cette lecture tortueuse.

“ Les patriotes ”

Les patriotes de Sana Krasikov aux Éditions Albin Michel

Traduit de l’américain par Sarah Gurcel

” « C’est ça qui compte aujourd’hui pour les bons patriotes, Florence ! De parfait culs-bénits qui agitent leurs petits drapeaux américains. Voilà ceux qui ont le pouvoir et voilà pourquoi j’en ai fini avec les grands États-Unis d’Amérique. »

Florence entendait de grosses larmes s’accumuler derrière certaines de ces tirades nasillardes. (…)

« Tu prêches une convertie » lui dit-elle joyeusement. Elle se demanda pourquoi le désarroi d’Essie la rendait si gaie. Puis elle réalisa que, pour la première fois depuis qu’elle avait quitté sa famille et embarqué sur le Brême, elle était absolument convaincue d’avoir pris la bonne décision. L’Amérique n’avait rien à lui offrir. « 

Alors que les États-Unis sont frappés par la grande dépression, Florence Fein décide de quitter son pays pour rejoindre l’Urss. À seulement 24 ans, elle laisse derrière elle sa famille à Brooklyn.

Ayant soif d’indépendance et de liberté, elle espère beaucoup de cette nouvelle vie, mais hélas les désillusions arrivent très vite et le retour en arrière impossible.

 » « Et toi, comment tu t’es retrouvée ici ? » demandra-t-elle une fois.

Florence avait appris à ce stade qu’il valait mieux privilégier les réponses simple. « Il n’y avait pas de travail aux États-Unis. Alors je suis venue en Russie. J’ai rencontré un homme et je suis restée. »

Comme de nombreux Refuzniks, son fils Julian, une fois adulte, émigre aux États-Unis.

Quelques années plus tard, en apprenant l’ouverture des archives du KGB, il retourne en Russie et décide de faire des recherches pour essayer de comprendre les zones d’ombre qui entouraient la vie de sa mère et tenté de persuader son propre fils de rentrer aux États-Unis avec lui.

” Ce qui a poussé sa mère à venir en Russie ne m’a jamais semblé étrange. Ce qui l’a poussé à y rester, voilà une autre histoire, sur laquelle je me suis interrogé. Par quel sortilège, en vertu de quoi (ou de qui) le paysage insipide autour d’elle s’était-il transformé en mosaïque prolétarienne colorée comme celles qui ornent encore cette ville mercantile ? “

” Je me suis dit qu’elle avait peut-être tout simplement fini par renoncer aux États-Unis, de la même manière que les États-Unis avaient si cruellement renoncé à elle.“

Entre passé et présent, Les patriotes nous embarque à travers le destin de trois générations d’une famille juive, l’histoire méconnue de milliers d’Américains abandonnés par leur pays en pleine terreur Stalinienne.

Ce que j’en dis :

Dès le départ j’ai été captivé par cette histoire au souffle romanesque extraordinaire. Il est impossible de ne pas s’attacher à Florence et de se révolter pour tout ce qu’elle va subir, alors qu’elle voulait juste retrouver l’homme aux yeux noirs dont elle s’était éprise et offrir ses services à ce pays.

Elle qui rêvait d’amour, de liberté, d’indépendance, va se retrouver prisonnière dans un pays qui n’est pas le sien et subir une dictature et des privations sans limites. Et pourtant elle gardera la foi et ne se détournera jamais de ses convictions, même dans les pires souffrances.

À travers ce roman choral qui couvre trois générations, on fait également connaissance avec son fils et son petit fils, et on se rends compte des conséquences que peuvent avoir certains choix de vie sur les générations futures.

Un roman ambitieux, qui se mérite et demande une lecture attentive et nous permet de saluer le courage de cette femme à une époque où justement il y avait tant à prouver. Par amour et pour ses convictions, elle sacrifiera presque toute sa vie à un pays qui la considérera toujours comme une étrangère, et peut-être même une espionne, elle aurait pourtant mérité amplement son statut de ” Patriote “.

Sana Krasikov nous offre un impressionnant premier roman, aux personnages touchants, bouleversants dans une ambiance communiste effrayante .

À découvrir absolument.

Pour info :

Sana Krasikov. Née en Ukraine en 1979, Sana Krasikov a grandi dans l’ancienne république soviétique de Géorgie avant d’émigrer aux États-Unis avec sa famille. Elle est l’auteur d’un recueil de nouvelles, L’An prochain à Tbilissi (Albin Michel, 2011), récompensé par le O. Henry Award et le prix Sami Rohr.

Je remercie les Éditions Albin Michel pour ce fabuleux roman.

“ Week-end à New-York ”

Week-end à New-York de Benjamin Markovits aux Éditions Christian Bourgeois

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Laurence Kiefé

” Il était toujours très impatient de retrouver ses parents et pourtant, chaque fois qu’ils venaient, il se rétractait, il n’avait plus envie de parler ni de se confier. C’était plus simple de bavarder au téléphone, c’était la relation à laquelle ils étaient habitués, une relation téléphonique. Quand il les voyait, il y avait donc toujours un moment de déception. On pouvait toujours prétendre qu’elle était provoquée par autre chose. Par le fait qu’à chaque retrouvaille, il pensait à l’âge qu’ils avaient et ne pouvait s’empêcher d’en rechercher de nouveaux symptômes. “

Paul Essinger, joueur de Tennis professionnel s’apprête à participer à l’US Open. À cette occasion toute sa famille débarque, ses parents, son frère et ses deux sœurs.

Habitué aux relations à distance, la communication n’est pas aisée.

Avec sa compagne, Dana et Cal, leur fils de deux ans, ils donnent l’image d’une famille new-yorkaise comblée issue des classes moyennes supérieures.

”Parfois, ça faisait du bien à Dana de s’en souvenir, les Essinger formaient une drôle de famille. “

Au cours de ce week-end, certaines tensions surgissent au cœur de cette famille assez particulière. Chacun s’interroge sur son rôle, ses responsabilités, ses obligations, face à la famille.

” Pour un œil étranger, ça devait ressembler à ce que c’était, une réunion de famille, mais qui aurait su dire jusqu’à quel point ils étaient heureux de se retrouver. “

Tolstoï disait : « Toutes les familles heureuses le sont de la même manière, les familles malheureuses le sont chacune à leur façon. », les Essinger ne feront pas exception.

Ce que j’en dis :

Ce n’est jamais simple pour moi de parler d’un roman qui ne m’a pas complètement conquise.

Si j’ai apprécié l’ambiance Woody Allen du récit, j’ai eu beaucoup plus de mal à m’attacher aux personnages qui me semblaient tous assez perturbés.

L’auteur nous brosse le portrait d’une famille qui se retrouve réunie pour applaudir en cas de victoire le héros de la famille, une petite star du tennis.

Une famille qui a bien du mal à communiquer même si le dialogue entre tous est omniprésent dans cette histoire.

On se balade à travers New-York en compagnie des différents membres de la famille en attendant le match qui risque bien de remettre en cause le futur de cette famille.

Benjamin Markovits dissèque plutôt bien le thème de la famille, son écriture est même plutôt agréable mais cette fois je ressort mitigée de ma balade new-yorkaise, une belle découverte néanmoins.

Pour info :

Benjamin Markovits a grandi au Texas, à Londres et à Berlin.

Il a mis fin à une carrière aventureuse de joueur de basket pour étudier les Romantiques. Depuis lors, il a enseigné l’anglais dans des lycées, dirigé la publication d’un magazine culturel et publié trois romans : The Syme Paper, Either Side of Winter et Imposture.

Parallèlement à son œuvre de fiction, il collabore à de nombreuses publications, parmi lesquelles le New York Times, la London Review of Books, le Times Literary Supplement et le Guardian.

Il vit à Londres depuis 2000 avec sa femme et sa fille. Il enseigne la Creative writing à l’université de la Royal Holloway.

 

Je remercie Lena et les Éditions Christian Bourgeois pour cette balade New-Yorkaise où je n’aurais pas été surprise d’y croiser Woody Allen derrière sa caméra.

“ Le bruit des tuiles ”

Le bruit des tuiles de Thomas Giraud aux Éditions La contre allée

” Au bout du chemin, une petite vingtaine de minutes après Dallas, il y a, au pied de la lettre, un champ de ruines. Un champ très grand, quoi qu’il soit difficile de délimiter la taille du champ tant l’espace des ruines, ce fantôme de pierres absentes, se mêle dans un camaïeu de jaune, au soleil, au ciel, au sable, à la poussière dans l’air, au reste du désert. (…) Plus loin, plus au sud, d’autres maisons mieux alignées. Des restes dispersés. Une organisation demeure identifiable, les murs, même tombés, continuent de faire parler, même si c’est très peu, ceux qui étaient là ; comme si, malgré l’absence de toute trace écrite on pouvait encore les entendre dire j’ai été là. Il y a les traces de passage d’une vie habitée mais pas celle de la mort qui serait resté. “

En 1855, Victor Considerant a fondé une communauté phalanstère au Texas. Appelée La Réunion, elle était située pas loin de Dallas.

Ce projet avait pour but de faire de Reunion, une colonie utopique capable de produire et distribuer ses récoltes au cœur de la communauté.

C’est lors d’un séjour aux États-Unis que Considerant a eu cet idée.

De retour en France, après de nombreuses conférences, il réussit à convaincre de nombreuses personnes à tout quitter pour investir et rejoindre son programme.

” Était-ce le manque de quelque chose qui les tenait prêts à tout quitter pour beaucoup de promesses ? Sont-ce les mots de Considerant qui parfois agissaient, comme s’il savait, qu’il s’était glissé dans leurs cœurs et dans leurs esprits, saisissait ce qu’étaient les vies que certains menaient ou justement, ce qu’elles n’étaient pas ? Celle de Leroux par exemple, une vie constituée de travail et d’inquiétude, solitaire, avec l’idée que la vie est toute petite et que l’on se prépare à une mort tout aussi insignifiante. Considerant avait du talent et les hommes étaient prêts, et lorsqu’on est prêts, on trouve beaucoup de talent à celui qui pourrait vous emmener, nous sortir de cet endroit où l’on vivote. “

Ce projet va connaître bien des déboires, à commencer par les piètres qualités des terres acquises, puis le mauvais accueil des voisins américains, et les aléas climatiques sans parler de l’invasion de sauterelles qui mettra fin à ce rêve fou.

” Ce qui l’a le plus surpris c’est que personne ne lui ait dit que le malheur devait se prévoir. Car quand on sait qu’il va venir, on l’attend, on anticipe, la surveillance à tout son sens. On est prêt. Il avait fait ce qu’il faut pour préparer le bonheur de tous dans une vie harmonieuse mais il n’était pas préparé pour trouver le malheur, et même surveiller l’arrivée de celui-ci, découvrir le désastre sur son chemin. “

Ce que j’en dis :

Qui était donc Victor Considerant ? Un rêveur, un gourou ? Un révolutionnaire ou un arnaqueur ?

C’est à travers les voix de plusieurs personnages, et également de Reunion, lieu du projet, un personnage à part entière, que l’auteur nous propose d’en découvrir davantage sur l’homme et son rêve.

Basée sur de véritables faitS historiques , l’histoire s’avère fortement intéressante.

On se rends très vite compte des difficultés auxquelles ils ont dû faire face, à commencer par la majorité des colons qui n’y connaissaient rien, tout comme l’instigateur, Considerant , très mal informé en amont et qui semble très vite dépassé par les événements.

Plus on avance, plus on se rend compte qu’ils n’avaient aucune chance de perdurer face à tant de malchance cumulée au reste.

Un récit qui amène à quelques interrogations et quelques réflexions, en ces temps où il serait bon de vivre de nos propres cultures et de partager nos récoltes.

Aimant sortir des sentiers battus, j’ai plutôt apprécié ce récit à la prose agréable, et découvrir ce projet qui mettait jusqu’à présent totalement inconnu.

Une sympathique découverte.

Pour info :

Thomas Giraud est né en 1976 à Paris. Docteur en droit public, il vit et travaille à Nantes. 

Depuis le bel accueil réservé à son premier roman, Elisée, avant les ruisseaux et les montagnes, Thomas Giraud contribue à Remue.net, 303, La moitié du Fourbi ou encore le Yournal. Son deuxième ouvrage, La Ballade silencieuse de Jackson C. Frank a aussi connu un beau succès puisqu’il a été nominé au prix de la brasserie Barbes (Littérature et musique) 2018, et au prix des lycéens et apprentis, île de France 2018 et obtenu le Prix Climax.

Le Bruit des tuiles, est son troisième roman à La Contre Allée.

Je remercie Aurélie et les Éditions de La contre-allée pour m’avoir permis d’élargir mon horizon et mes connaissances.