“ L’écart ”

L’écart d’Amy Liptrot aux Éditions Globe

Traduit de l’anglais par Karine Reignier- Guerre

Notre écart se cache derrière une petite colline et longe la mer. À certains endroits, les maisons voisines disparaissent, et personne ne peut nous voir depuis la route. “

Grande, fine, intrépide, elle est de retour sur l’île qui l’a vu grandir. Elle revient de Londres, où tout est trop cher et où le travail se fait rare.

J’étais une enfant courageuse et téméraire. (…) Plus tard, j’ai développé un sens de la fête (et tout ce qui allait avec : alcool, drogues, rencontres, sexe) qui m’a poussée à vivre des expériences extrêmes, sans réfléchir aux conséquences qu’elles pouvaient avoir. J’étais sans cesse en quête de sensations nouvelles et je me déchaînais contre ceux qui tentaient de me mettre en garde. Je menais une existence rude, tempétueuse et chaotique. “

Elle revient de loin, elle s’est perdue en route et a bien failli se noyer dans l’alcool.

L’alcool avait pris possession de mon existence. (…) L’alcool me séparait de lui et du reste du monde. Je me déconstruisais, verre après verre. “

Elle vacille, hésite entre deux destins : retrouver Londres qui brille de mille tentations ou se reconstruire dans cet archipel des Orcades où la vie rude lui semble vide et lui fait peur.

” Au cours du printemps, je remarque une annonce pour un projet financé par la Société royale de protection des oiseaux. Les responsables locaux sont à la recherche d’un employé pour l’été. J’hésite – je continue de croire que je reprendrai bientôt à Londres le cours de ma « vraie vie » – puis je décide d’envoyer ma candidature. Le projet m’intéresse. Pourquoi ne pas tenter ma chance ? “

Difficile de laisser tomber la bouteille, alors quand cette opportunité se présente, un nouveau choix s’impose. Pour elle qui se sent depuis si longtemps à l’écart du monde, rejoindre l’Écart et ses paysages insulaires pour y chercher un oiseau nocturne, menacé et farouche comme elle, un choix qui s’impose de lui-même.

Peut-être le départ d’une nouvelle vie…

«  L’avenir ne s’annonce peut-être pas si mal, après tout. J’ai troqué les boules à facettes des discothèques pour les lumières célestes, mais je reste entourée de danseurs : soixante-sept lunes gravitent autour de moi. “

Ce que j’en dis :

J’ai choisi ce roman à l’occasion d’une opération Masse critique chez Babelio, roman qui avait attiré mon attention en lisant certains retours sur la toile.

Après cent cinquante pages laborieuses où je me noyais dans le marasme et l’apitoiement de la jeune femme, face à son problème avec l’alcool, j’ai abdiqué et mis à l’écart ma lecture.

Sur les conseils d’une lectrice qui l’avait vraiment apprécié, j’ai repris et enfin terminé ce récit. Je reconnais que cette dernière partie où l’on suit sa reconstruction est davantage intéressante et a résonné davantage en moi. Partager son quotidien, découvrir la nature et sa faune merveilleuse m’a réconcilié avec son histoire. La beauté de ces contrées lointaines a le pouvoir de nous émerveiller et de nous redonner de l’espoir, à condition d’ouvrir les yeux et de laisser entrer la lumière dans notre cœur, tout comme les étoiles s’imposent à la nuit et illuminent toute cette noirceur.

” J’ai renoncé à l’alcool, je ne crois pas en Dieu, et mes histoires d’amour se sont mal terminées, mais je trouve maintenant mon bonheur et mon ivresse dans le monde qui m’entoure. “

Un beau voyage en terre inconnue assez sombre qui s’illuminera, une fois parvenu vers d’autres rivages. (Après les 150 première pages).

Pour Info :

Surnommée « la femme du Roi caille » par les soixante-dix autres résidents de la petite île de Papay, Amy Liptrot est retournée à Orkney pour travailler à la Société Royale pour la protection des oiseaux. Elle y enregistre et documente des informations sur le Roi caille – un oiseau rare et secret qui fait son nid dans les hautes herbes et qui fait le bruit d’une cuillère traînée contre un égouttoir à vaisselle. Elle est lauréate du PEN Ackerley Prize 2017 et duWainwright Prize 2016. L’écart est son premier roman.

Je remercie les Éditions Globe et Babelio pour ce voyage dépaysant entre ciel et mer.

Hillbilly Elégie

Hillbilly Élégie de J.D Vance aux Éditions Globe


 » (…) il n’y a pas de méchants dans cette histoire. Il y a juste une drôle de bande de Hillbillies qui luttent et cherchent leur voie – pour eux et, par la grâce de Dieu, pour moi aussi.  » 



J.D Vance a grandit dans les Appalaches au coté des siens. Dans cette immense région des États-Unis la pauvreté règne en maître. L’industrie du charbon et de la métallurgie a périclité entraînant une hausse du chômage irrémédiable. Une région touchée de plein fouet par les crises successives.


 » Il ne faut pas s’étonner si nous sommes des gens pessimistes. » 

 » c’est dans ces montagnes que le sort des blancs de la classe ouvrière semble le plus rude. Avec sa faible mobilité sociale, sa pauvreté, les divorces et la consommation de drogue, ma région est un concentré de misère.  » 

Un ton sans détour pour nous raconter cette Amérique blanche et pauvre donc il est issu et qui a porté Trump au pouvoir.

 » (…) les Hillbillies apprennent dés leur plus jeune âge à ignorer toute vérité inconfortable ou à croire qu’il en existe de plus justes. Cette tendance contribue à leur résilience psychologique, mais elle les empêche aussi d’avoir une image honnête d’eux-même.  » 


Il nous plonge dans ses racines, son enfance jusqu’à son ascension sociale. Il n’hésite pas à parler de la classe ouvrière oubliée.

 » Certains en concluraient que je viens d’une famille de fous. Moi, ces récits me donnaient le sentiment d’appartenir à la famille royale des Hillbillies, car c’étaient de bonnes vieilles histoires où le bien affrontait le mal, et les miens étaient toujours du bon coté. « 



Sa volonté et le soutien de sa grand-mère qui a palié au mieux jusqu’à sa mort à l’inaptitude de ses parents, lui permirent de changer de classe sociale.

 » Quand je m’étais engagé, je l’avais fait en partie parce que je n’étais pas prêt à mener une vie d’adulte. À présent, je savais précisément ce que je voulais faire de ma vie et comment y arriver. trois semaines plus tard, les cours commençaient à Ohio State.  » 

Un magnifique roman autobiographique, qui soulève des questions essentielles. Comment peut-on ne pas manger à sa faim dans le pays le plus riche du monde ? Comment l’Amérique démocrate, ouvrière et digne est-elle devenue républicaine, pauvre et pleine de rancune ?

Un récit passionnant, touchant et plein d’humanité conté par un homme qui sait de quoi il parle.

Là où les Américains voient des Hillbillies, des rednecks ou des white crash, J.D Vance vois ses voisins, ses amis, sa famille.

« Comme le disait Mamaw, on peut arracher un garçon au Kentucky, mais on ne peut pas arracher le Kentucky de son cœur.  » 

À DÉCOUVRIR ABSOLUMENT

J.D Vance est né en 1984 a grandi entre Middletown, Ohio, Jackson et Kentucky. ancien marine, il est diplômé de l’Ohio State University et de la Yale Law School. Avocat de formation, il travaille et vit à San Francisco 

Je remercie les matchs de la rentrée littéraire 2017 de PriceMinister pour cette lecture essentielle et enrichissante.