Le chant des revenants de Jesmyn Ward aux Éditions Belfond
Traduit de l’américain par Charles Recoursé
” « Toutes les choses ont un pouvoir. »
Il a cogné sur une bûche.
« C’est mon arrière- grand-père qui me l’a appris. »
La bûche s’est fendue.
« Il disait qu’il y’a un esprit dans chaque chose. Dans les arbres, dans la lune, dans le soleil, dans les animaux. Il disait que c’est le soleil le plus important et il lui avait donné un nom : Aba. Mais on a besoin de tous les esprits, de tous les esprits de toutes les choses, pour qu’il y ait un équilibre. Pour que les récoltes poussent, que les animaux se reproduisent et qu’ils engraissent avant qu’on les mange. » (…) « Il faut un équilibre des esprits. Et un corps, c’est pareil, il m’a dit. » ”
Jojo est toujours à l’écoute quand son grand-père, Pop lui parle. C’est lui qui tente de lui donner une bonne éducation avec Mam sa grand-mère puisque sa mère Leonie, une toxicomane n’est pas à la hauteur.
Il vit avec sa mère et sa sœur, Michaela, chez leurs grands-parents dans une ferme du Mississippi.
Mam se meurt d’un cancer. Le père des enfants, un homme blanc séjourne en prison. Il ne reste plus que Pop pour soutenir la famille et faire de Jojo un homme.
Jusqu’au jour où le père est enfin libéré. Leonie embarque ses enfants et part avec une amie, direction Parchman, le centre pénitencier du Mississippi, pour retrouver son homme. Un voyage dangereux, encombrés de fantômes qui va une fois de plus malmener ces enfants.
” Il y a des gens : minuscules et distincts. Ils volent et marchent et flottent et courent. Ils sont seuls. Ils sont plusieurs. Ils se baladent sur le sommets. Ils nagent dans les rivières et dans la mer. Ils marchent en se tenant la main dans les parcs, dans les squares, disparaissent dans les bâtiments. Ils ne se taisent jamais. Leur chant est omniprésent : leur bouche ne remue pas et pourtant ça émane d’eux. Une mélodie dans la lumière jaune. Ça émane de la terre noire, des arbres et du ciel toujours éclairé. Ça émane de l’eau. C’est le plus beau chant que j’aie entendu, mais je n’en comprends pas un mot. “
Ce que j’en dis :
J’ai découvert cette formidable auteure à travers son premier roman Bois sauvage, en 2012. Un récit magnifique, marquant l’arrivée d’une nouvelle plume américaine talentueuse saluée d’emblée par le prestigieux prix du National Book Award.
À travers ce nouveau roman, Le chant des revenants, elle nous embarque dans un road-trip très particulier, un voyage dans le temps traversé par des fantômes où se côtoient les vivants et les morts.
Dans sa soif de réparer les injustices, l’auteure donne la voix à ceux partis trop tôt, mais également à ceux qui se battent face au racisme jour après jour.
Un monde brutal s’offre à nous, où sont plongés malgré eux ces deux enfants face à leur mère immature, sans une once d’instinct maternel.
Dans ce roman noir, fidèle aux croyances afro-américaines, le réel côtoie l’irréel, et donne à cette histoire, d’une beauté âpre une aura singulière.
Jesmyn Ward a un talent fou pour nous parler de ses racines, éveiller nos consciences face à cet éternel racisme toujours omniprésent, à travers des histoires touchantes et une plume magnifique où le lyrisme de son écriture illumine toute cette noirceur.
On ne s’étonnera donc pas, qu’elle reçu pour la deuxième fois, le National Book Award.
Un roman puissant, d’une beauté à couper le souffle.
Pour info :
Jesmyn Ward est née en 1977 à DeLisle, dans l’État du Mississippi.
Issue d’une famille nombreuse, elle est la première à bénéficier d’une bourse pour l’université.
Son premier roman, Ligne de fracture (Belfond, 2014 ; 10/18, 2019), a été salué par la critique. Mais c’est avec Bois Sauvage (Belfond, 2012 ; 10/18, 2019) qu’elle va connaître une renommée internationale, en remportant le National Book Award.
Son mémoire, Les Moissons funèbres (éditions Globe, 2016 ; 10/18, 2019), s’est vu récompensé du MacArthur Genius Grant.
Avec Le Chant des revenants, sélectionné parmi les dix meilleurs romans de l’année 2017 par le New York Times, Jesmyn Ward devient la première femme deux fois lauréate du National Book Award.
Jesmyn Ward vit dans le Mississippi, avec son époux et leurs deux enfants.
Je remercie les Éditions Belfond pour ce roman émouvant où le chant des revenants résonnera en moi fort longtemps.
Décidément, je ne lis que des avis élogieux sur ce roman ! Je l’ai eu en mains pas mal de fois depuis sa sortie, ainsi que « Les moissons funèbres », sans me décider à les acheter … mais je sens que je vais craquer 😉
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Faut pas hésiter, et le lire avant de le prêter…
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Hello! En plus d’un beau titre, d’une belle couverture et d’un beau résumé, ta chronique complète les arguments!!
Au top! Merci
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Tes adorable 😉
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Il est excellent, ce roman noir ! J’ai les deux autres sur ma PAL 😉
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Super 😉
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