Les chasseurs de gargouilles de John Freeman Gill aux éditions Belfond
Traduit de l’américain par Anne-Sylvie Homassel
” À L’ÉPOQUE, TOUT LE MONDE LE SAVAIT : New York était la ville la plus chaotique de tout le pays, la plus dévastée par le crime, la plus couverte de graffitis. Nous étions nombreux à nous enorgueillir quelque peu de cette distinction. Il y avait pourtant bien des aspects de ma ville natale qui m’étaient alors inconnus. Par exemple, j’étais loin de savoir que New York était au bord de la faillite, que ses maires successifs avaient fait des promesses extravagantes qu’ils étaient incapables de financer,qu’à chaque printemps la ville devait emprunter des fortunes pour continuer à éclairer les rues et à fournir des uniformes à sa police. Il y a des choses qu’on ne raconte pas aux enfants. (…) La ville était sur la mauvaise pente. En situation instable. ”
Année 1970, la ville de New-York est en pleine crise financière. C’est également la crise dans la famille Watts où l’argent se fait rare.
La vie de Griffin, 13 ans vole en éclat, ses parents se séparent. Son père Nick, antiquaire passionné s’est donné pour mission de sauver de la démolition les gargouilles sur les immeubles new-yorkais, précieux témoignages d’un autre temps, d’une histoire architecturale bouleversante, sacrifiés peu à peu sur l’autel du modernisme.
« Griffin, je vais te dire quelque chose. Ça va à toute vitesse. Entre la rénovation urbaine et tout ces immeubles modernes pourris, sans âmes, tous pareils, qu’on te colle partout – les HLM, les tours de bureaux comme tu en vois de Tokyo à Londres, les immeubles d’habitation tout mastocs, d’abord en brique blanche, puis jaune et maintenant rouge -, crois-moi, ce n’est plus qu’une question de quelques mois ou quelques années avant que tout le patrimoine ornemental privé de la ville disparaisse. »
Profitant de l’agilité de son fils, Nick n’hésite pas à se servir de lui pour détrousser les façades des immeubles les plus inaccessibles.Grisé, Griffin se prend au jeu, il ferait n’importe quoi pour obtenir les faveurs de son père. Il se lance dans une chasse au trésor la plus fantastique de sa vie.
” Si bien que je transformai la chose en jeu. Ces murs en surplomb devinrent les flancs de de bois de deux grands trois-mâts dissimulant sous leurs contrevents de rangées de canons. Et j’étais là -moi, le gamin des rues,téméraire et fugueur qui m’étais engagé sur un navire de pirates pour explorer le monde…“
Mais la folie de Nick ne semble pas avoir de limites, et le voilà mêlé au vol du siècle, celui d’une façade en fer forgé d’un vieux building, condamné à la destruction…
Ce que j’en dis :
En grande amoureuse de New-York, je ne pouvais pas passer à coté de ce roman.
Cette ville y est magnifiquement représentée par l’auteur, des passages sublimes illustrent ce roman et mets en lumière la ville qui ne dort jamais. Une ville qui se renouvelle jour après jour.
” La ville avait la métamorphose dans la peau. “
Apparemment, le patrimoine historique américain est mal protégé, et ces fameux détrousseurs d’immeubles tentent à leur manière d’en sauver une partie, il est bien dommage que l’argent mère de tous les vices fasse partie de l’équation.
En attendant, même si certaines descriptions historiques étaient un peu barbantes à mon goût, ce roman m’a transporté, on sent derrière ces mots tout l’amour que l’auteur porte à sa ville.
Ce récit nous fait partager la vie de cette famille plongée dans le chaos, les tourments des adolescents et les relations parfois difficile entre le père et son fils, faites de passion, d’adulation mais aussi de déception.
Un roman magnifique, enrichissant, intense et même souvent drôle porté par une plume singulière et élégante. Une belle déclaration d’amour à travers une quête qui semble impossible.
Un beau récit, qui plaira à tous les amoureux de New-York, de l’art et des aventures fantastiques.
John Freeman Gill est né à New York. Passionné de sa ville natale, il écrit régulièrement sur le sujet. Son travail a notamment été publié dans le New York Times Book of New York et More New York Stories. Il écrit, entre autres, pour The New York Times, The Atlantic et The New York Observer. Les chasseurs de gargouilles est son premier roman.
Diplômé de Yale, John Freeman Gill vit à New York avec sa femme et leur trois enfants.
Je remercie les Éditions Belfond pour cette lecture passionnante.