Mindwinter de Fiona Melrose au Éditions La Table Ronde
Traduit de l’anglais par Édith Soonckindt
» J’étais là à éprouver le genre de tristesse qui se coince dans la gorge. Je ne pleurais pas et je n’avais toujours pas bougé de là où j’étais. (…) S’il me cherchait dans la nuit, je reviendrais lui dire qu’on oubliait tout, que je ne l’accusais de rien. Je voulais lui expliquer que Ma me manquait à moi aussi. «
Landyn Midwinter et Vale son fils, sont agriculteurs dans le Suffolk. Ce sont des hommes du terroir. En ces temps difficiles, où ils doivent déjà faire face à la concurrence des grandes entreprises pour garder leur ferme, ils mènent un combat familial face à un drame survenu dans le passé.
« Cette sensation maladive qui précède le moment d’ouvrir une porte et de voir ce qu’on ne peut plus esquiver, je l’avais déjà éprouvée, je l’avais déjà connue. ”
Vale avait dix ans quand il fut privé de sa mère à jamais. À l’époque ils étaient en Zambie où son père avait déjà tenté de sauver l’entreprise familiale.
“ Un arbre fort peut subir une mauvaise gelée ou perdre une branche entière dans une tempête, ce sont les racines qui le maintiennent droit. C’était le cas de Vale. ”
Lors d’un hiver particulièrement rigoureux, les douleurs de Landyn et Vale, se réveillent et mettent en péril l’équilibre familial déjà très malmené.
Vale se perd dans son désespoir tandis que son père se réfugie auprès de sa terre et de ses bêtes.
« Je sais pas quoi faire.
– Tu trouveras. Ouvre l’œil.
– Pourquoi ?
– Tu le sauras. Tu le sauras dans ton cœur.
– L’autre soir j’ai cru que ça pouvait bien être elle qui m’avait aider à trouver le rivage.
– J’en doute pas. Pas une seule seconde. Elle veille sans cesse sur nous tellement on est bon à rien. »
Chacun se raccroche à ce qu’il peut, rongé par la culpabilité et essaye de réparer ses erreurs.
“ (…) j’ai vu à travers la pluie, un grand panache roux bordé de blanc filer vers les buissons. Ma renarde. Elle était là. ”
Il affronte enfin le souvenir qui les hante, et mettent à l’épreuve le fragile tissu de leur relation.
» Ce jour-là, ce vieil arbre m’a encouragé. Il était porteur d’une histoire et d’une guérison. Il y en avait un qui lui ressemblait dans notre ferme à Kabwe, un arbre du coin, je n’ai jamais su son nom mais je connaissais son cœur. Il y a comme ça des arbres qui vous offrent leur ombre un jour de grande chaleur. Et qui vous laissent vous asseoir très près avec tout votre être. ”
À travers ce roman sombre illuminé par une sublime plume lyrique, Fiona Melrose nous offre un premier roman absolument réussi.
Situé entre le Suffolk et la Zambie ce récit nous est conté en alternance par Vale et son père Landyn, deux hommes hantés par des souvenirs tragiques. Deux hommes qui se livrent et se délivrent chacun à sa manière à travers un va- et-vient temporel et géographique admirablement bien construit.
Une histoire d’hommes qui ont la rage de vivre, malgré tous les obstacles qui parsèment leurs vies.
Un roman naturaliste tout en poésie, qui dépeint à merveille la fragilité des relations, traite de la culpabilité qui ronge les cœurs, tout en gardant une lueur d’espoir.
Un roman sensible, qui réunit les hommes et les bêtes pour mieux les réconcilier et les aider à combattre leur chagrin. On rêve, on pleure, on espère, on s’émerveille à travers ce récit magistral plein d’humanité.
Un premier roman de toute beauté , une magnifique découverte, un voyage livresque enchanteur.
Née à Johannesburg, Fiona Melrose a eu plusieurs carrières, notamment dans l’analyse politique pour des ONG et le secteur privé. Elle a vécu à Londres et dans le Suffolk et continue de vivre entre l’Afrique du Sud et l’Angleterre. Mindwinter a été sélectionné pour le Baileys Women’s Prize for Fiction 2017. Johannesburg, son deuxième roman, vient de paraître en Angleterre.
Je remercie Anne-Lucie et les Éditions de la Table Ronde pour ce roman aussi touchant qu’époustouflant.
Beau renard ! 🙂
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Magnifique tu devrais l’adopter 😉
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Les poules ne seraient pas contentes ! 😀 Les chats non plus, les renards mangent les chats !
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